Les récits d’adolescence sont souvent bruyants, on s’y engueule, on y pète les coquilles devenues trop étroites, la musique s’y écoute trop fort, les goûts s’y forment dans l’excès, tout est trop génial ou trop horrible, les tee-shirts trop courts et les pantalons trop longs ou inversement – «trop n’est pas assez» pour reprendre le titre de l’ébouriffant road-trip adolescent d’Ulli Lust. Weng Pixin, elle, raconte les silences comme personne. Dans sa deuxième bande dessinée d’inspiration autobiographique, N’en parlons plus, l’autrice singapourienne montre des fragments de vie de cinq jeunes femmes d’une même famille, au moment de leurs 15 ans : son alter ego fictif Bi («Jolie») en 1998, son arrière-grand-mère Kuan («Grande») en 1908, sa grand-mère Mèi («Petite sœur») en 1947, sa mère Bing («Glace») en 1972 et sa fille imaginaire Rita en 2032. Si Kuan subit la disette à la campagne et l’émigration forcée, Mèi empoche quelques centimes pour les chemises qu’elle aide à rapiécer, Bing va au lycée et Bi a carrément sa propre chaîne stéréo sur laquelle écouter les Smashing Pumpkins quand le mal de vivre se fait trop intense.
Mais, à l’abri du besoin ou non, elles ont en commun de ne pas très bien piger tout ce qui leur arrive et tâtonnent en