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Bande dessinée

Sélection Angoulême 2024 : des bulles et des anneaux, une édition sous l’influence des JO

Festival de la BD d'Angoulême 2025dossier
Après une édition 2023 mouvementée, la 51e édition du festival de BD s’inscrira dans un contexte d’olympiade culturelle. A l’honneur l’an prochain, le Canada, les mangas et toujours trop peu d’autrices.
Un mur avec les personnages de bandes dessinées Blake et Mortimer lors du 47e Festival international de la dande dessinée d'Angoulême, en 2020. (Joël Saget/AFP)
publié le 16 novembre 2023 à 17h17

On a rarement autant entendu parler de course à pied dans un événement dédié à la BD. Ce jeudi 16 novembre se tenait la grande conférence de presse du 51e Festival international de la bande dessinée d’Angoulême (FIBD), et pour l’occasion, la presse était conviée à Saint-Denis dans les locaux flambant neufs du comité d’organisation des Jeux olympiques (Cojo), au premier étage d’un immeuble baptisé «Pulse» dont les escaliers vous invitent à battre des records de vitesse (on vous y indique combien de secondes vous séparent en moyenne de chacun des étages supérieurs). Dans cet environnement on ne peut plus dynamique, on découvre les trois affiches du festival, signées Riad Sattouf, Hiroaki Samura et Nine Antico, cette dernière faisant, avec sa grappe de jeunes lectrices de BD à coupe afro ou à jambes poilues, comme un clin d’œil complice à l’édition passée que l’on avait vue secouée par les revendications féministes et les appels à plus d’inclusivité, après l’affaire de celui-dont-on-ne-prononcera-pas-le-nom.

Valeurs olympiques

Après un teaser vidéo sur un beat musclé évoquant plutôt les combats de super-héros que l’art délicat du roman graphique et où s’enchaînent à un rythme effréné de glorieuses images de Riad Sattouf brandissant son Fauve d’honneur, de Druillet, de breakdance (?) et de Juliette Armanet (??) dont on suppose qu’elles sont censées figurer la fusion entre les arts, le délégué général du festival, Franck Bondoux, accueille l’assemblée par des remerciements prolongés au «Cojo» –qu’on entendra évoqué une bonne cinquantaine de fois – et un bon tiers de la conférence sera consacré à la notion d’olympiade culturelle dont le FIBD sera le premier événement majeur.

On verra ainsi se succéder Thierry Rey, champion olympique de judo et conseiller spécial de Paris 2024 («très impressionné d’être en face de tous ces journalistes culture alors que nous, on n’est que le sport») et Dominique Hervieu, directrice culturelle du Cojo, venue vanter les liens entre l’art et les valeurs olympiques («excellence et dépassement de soi») mais aussi mettre en avant les «cinq festivals emblématiques» dont la programmation se fera en partenariat avec les JO : Angoulême, qui «ouvrira le bal», suivi de Cannes, Arles, Avignon et Rock en Seine. Concrètement, le FIBD a «collaboré avec nos amis mosellans», spécifie Bondoux, en organisant au château de Malbrouck une exposition sur la course à pied qui s’y tiendra jusqu’en octobre 2024 («la course à pied c’est incroyable» s’enflamme le délégué général du festival), la «communauté des coureurs de Moselle» ayant même été intégrée au projet «Inside Out» de l’infatigable JR. L’expo «l’Art de courir» sera également déclinée au musée d’Angoulême, qui montrera des œuvres inédites de Lorenzo Mattotti sur le sujet, avec des textes de Maria Pourchet.

Orgie de sabres

Autres spécificités de cette 51e édition, le Canada bénéficiera cette année d’une place de choix, et le quartier manga continue de se développer, avec le maître mot d’«immersion» souligné par le codirecteur artistique Fausto Fasulo et repris par sa collègue Marguerite Demoëte, fraîchement nommée cette année après le départ de Sonia Déchamps. Côté expositions, le FIBD continue d’«embrasser le scope du manga» pour reprendre les termes de Fasulo – on verra donc exposés deux artistes japonais : Moto Hagio, autrice avant-gardiste du genre, désormais septuagénaire et exposée pour la toute première fois en dehors du Japon, et une orgie de sabres de Hiroaki Samura à l’espace Franquin, mais aussi un espace immersif consacré à l’univers de la série #DRCL midnight children et la présence du réalisateur Rintarô (qui était déjà invité du récent festival Lumière de Lyon pour une masterclass) autour de son autobiographie Ma vie en 24 images par seconde. Enfin, Nine Antico bénéficiera d’une ample rétrospective à l’Hôtel Saint-Simon (qui accueillait l’an dernier l’expo Julie Doucet) et Riad Sattouf, Grand prix en 2023, investira le vaisseau Moebius (dont une partie sera également consacrée au scénariste Thierry Smolderen) avec l’Arabe du futur. Notons que Julie Doucet, qui avait remporté exactement le même prix que Riad Sattouf, n’a pas bénéficié des honneurs du même bâtiment.

On apprenait également que cette année, c’est Julie Birmant qui remporte le prix Goscinny du meilleur scénario pour l’enthousiasmant premier tome de Dali, dessiné par Clément Oubrerie – dont il sera question plus amplement dans nos pages Images ce week-end. Dans l’ensemble, aucune allusion directe n’aura été faite aux problématiques soulevées par la 50e édition, si ce n’est peut-être à la toute fin au détour d’une phrase de Franck Bondoux réitérant l’importance donnée à la tenue de rencontres et de forums, «en considérant que le festival doit rester un espace de débat et non pas d’invective». La proportion de femmes dans la sélection officielle reste, elle, sensiblement la même : un peu moins d’un tiers sur l’ensemble des albums.

Toute la sélection officielle

Acting Class de Nick Drnaso (Presque Lune).

Astra Nova de Lisa Blumen (l’Employé du Moi).

Blood of the Virgin de Sammy Harkham (Cornélius).

Blue Giant Explorer tome 1 de Shinichi Ishizuka (Glénat).

La Boucle de Vincent Vanoli (Oui’Dire).

Chainsaw Man tome 13 de Tatsuki Fujimoto (Crunchyroll).

Chair à canon d’Aroha Travé (FLBLB).

Chumbo de Matthias Lehmann (Casterman).

Le Ciel dans la tête d’Antonio Altarriba, Sergio García Sánchez et Lola Moral (Denoël).

Creuser Voguer de Delphine Panique (Cornélius).

Les Daronnes de Yeong-Shin Ma (Atrabile).

Dédales tome 3 de Charles Burns (Cornélius).

Le Dernier Sergent tome 1 de Fabrice Neaud (Delcourt).

Des maux à dire de Beatriz Lema Rivera (Sarbacane).

Dum Dum de Lukasz Wojciechowski (Çà et là).

Emkla de Peggy Adam (Atrabile).

Et l’île s’embrasa de John Vasquez Mejias (Ici-bas).

Evol tome 1 d’Atsushi Kaneko (Delcourt).

The Fable tome 13 de Katsuhisa Minami (Pika).

Fleur de lait de Miguel Vila (Presque Lune).

Goiter de Josh Pettinger (Ici Même).

Hanbok tome 1 de Sophie Darcq (l’Apocalypse).

L’Homme gêné de Matthieu Chiara (l’Agrume).

L’Illusion magnifique tome 1 d’Alessandro Tota (Gallimard BD).

Les Imbuvables de Julia Wertz (l’Agrume).

Jumelle tome 1 de Florence Dupré la Tour (Dargaud).

Kujô l’Implacable tome 3 de Shôhei Manabe (Kana).

Madones et Putains de Nine Antico (Dupuis /Aire Libre).

Mary Pain de Lola Lorente (Actes Sud BD).

Monica de Daniel Clowes (Delcourt).

Le Nécromanchien de Matthias Arégui (2024).

The Nice House on the Lake tome 2 de James Tynion IV et Alvaro Martinez Bueno (Urban Comics).

Océan Express de François Ayroles (L’Association).

Les Oiseaux de papier de Maya Neyestani (Çà et là).

Quelques minutes après que le temps s’arrête de Double Bob (Frmk).

Saga tome 11 de Brian K. Vaughan et Fiona Staples (Urban Comics).

Saint-Elme tome 4 de Serge Lehman et Frederik Peeters (Delcourt).

Sibylla de Max Baitinger (L’Employé du moi).

Slava tome 2 de Pierre-Henry Gomont (Dargaud).

Suicide total de Julie Doucet (L’Association).

Une chouette vie de Hideyasu Moto (Misma).

Une éducation orientale de Charles Berberian (Casterman).

Une enfance de paille de Lika Nüssli (Atrabile).

La Véritable Histoire de Saint Nicolas de Thierry Van Hasselt (Frmk).

Le Visage de Pavil de Jérémy Perrodeau (2024).