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«Un et demi» de Valfret, à travers les rages

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Entre colère et poésie, vérités et mensonges, le Français dépeint en aquarelles et de façon fascinante la vie d’un jeune homme désabusé dans une campagne où tout peut arriver.
Extrait de «Un et demi», de Valfret. (Ed. Fremok)
publié le 24 janvier 2024 à 14h29

L’objet est petit et épais. Il tient dans la paume d’une grosse main (11,5 sur 14,5 cm) et, par son nombre de pages (384 !), il pourrait servir comme arme pour laisser éclater sa rage. C’est ce que fait l’auteur Valfret, entre les pages, dans une succession d’aquarelles carrément abstraites ou presque réalistes. D’un journal intime à la fiction, on passe de corps aux torses roses à des canettes qui traînent par terre, des nuages, des fils électriques, des splashs colorés comme autant de tests de Rorschach, des bêtes inquiétantes, des fleurs piquantes (des cactus ?) et même des dinosaures apparaissant subrepticement dans les feuillets. La vie rurale d’un adolescent dans un monde où l’on s’emmerde, l’on rêve de révolution, de tout péter, tout brûler : boum comme les couleurs sur le papier.

Dans Un et demi, la recherche est fascinante sur l’image et le discours, poussant le curseur du neuvième art dans des traverses où peu osent s’aventurer. Sur les trois premières pages, sous un décor de forêt sombre dont ne se détache qu’une silhouette, l’auteur écrit : «Il se leva, leur fit signe qu’il était l’heure de son discours /Tout le monde était bien installé, un verre à la main /Il commença à leur mentir.» Si tout ce qui suit, alors, n’est que mensonge, il est donc demandé au lecteur d’avancer l’esprit ouvert, Petit Poucet acceptant de s’enfoncer dans les bois sans cailloux, au risque de se faire dévorer.

Tondeuse dans une main, pinceau dans l’autre

Sous ses tableaux, Valfret nous assène des vérités : «Les parent