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Opéra

«Carmen.», joyau de Bohême

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De digressions en morceaux de bravoure, la soprano Rosemary Standley interprète le chef-d’œuvre de Bizet seule en scène. Un tour de force orchestré par le metteur en scène François Gremaud.
Rosemary Standley dans «Carmen» version François Gremaud. (Dorothée Thébert Filliger )
publié le 22 octobre 2023 à 16h59

Preuve qu’aller voir au spectacle ne va plus complètement de soi ces temps-ci, on s’étonne, ce soir de première, de la salle des Abbesses pour un tiers vide à quelques minutes du début de la représentation de Carmen. – avec un point, c’est important, troisième volet après Phèdre ! et Giselle… du triptyque du Suisse François Gremaud, sur trois figures féminines tragiques des arts vivants.

«Le public décommande à cause de la guerre ?» s’informe-t-on sur le ton de la certitude. «Non, c’est la ligne 12 ! Elle est bloquée.» La question se pose cependant : est-il seulement possible d’entrer dans un spectacle comme si de rien n’était et de rester dans cette bulle ? Et bien, pas complètement. Du reste, la merveilleuse Rosemary Standley, aussi à l’aise dans l’art lyrique que dans une imitation de Mireille Mathieu, explose involontairement cette bulle, quand vers le milieu de la représentation, au lieu de dire «toreador», elle ébauche le mot «terroriste».

Belle sortie vers le réel ! Silence. Emotions partagées. La chanteuse-comédienne revient à ses taureaux, nous aussi. Aussi curieux que cela puisse paraître, au théâtre, les lapsus directs, partagés franchement avec le public, sont rarissime