Amin Jafari est directeur de la photo en Iran. Il a travaillé sur une trentaine de films, courts et longs métrages. Sa première collaboration avec Jafar Panahi date du film Trois Visages (2018). Pour Aucun Ours, il a accepté de répondre à nos questions par téléphone, Panahi étant toujours incarcéré dans la prison d’Evin, à Téhéran, depuis le mois de juillet 2022.
Le film est l’histoire d’un tournage compliqué, contrarié. Est-ce aussi ce que vous avez vécu ?
Travailler avec Jafar Panahi, c’est très différent de tout ce que j’ai pu faire avec d’autres cinéastes. Sa situation particulière (il n’a pas le droit de tourner depuis 2010) nous oblige à fonctionner en toute petite équipe. Je suis chef opérateur mais là, je deviens un peu touche-à-tout puisque nous ne sommes qu’une dizaine sur le plateau, et il peut m’arriver de faire l’assistant, l’accessoiriste, de m’occuper des costumes ou du maquillage. On n’a pas d’autorisation donc il nous faut agir clandestinement. Pour ce film, Jafar Panahi a mené avant les premières prises un long travail de repérage pendant trois mois : il est très obsessionnel dans sa quête du lieu parfait et il a trouvé ce village près de Tabriz, à proximité des frontières de l’Azerbaïdjan et de l’Arménie. On s’est installé là et Jafar a fait tourner les gens du village qui étaient vraiment super sympas et très contents d’être à l’image. Mais un mouchard nous a dénoncés à la police au bout d’un certain temps et on a vu des agents débarque