Deux jours après sa fuite de l’Iran qu’il n’avait pas le droit de quitter, le cinéaste Mohammad Rasoulof a expliqué sa décision de partir et appelé au soutien du milieu cinématographique dans un long communiqué dont Libération a eu connaissance ce mardi 14 mai. Son départ d’Iran a eu lieu «peu de temps après sa condamnation plusieurs années de prison, à des coups de fouet, à une amende et à la confiscation de ses biens par le tribunal révolutionnaire iranien», indique le communiqué. Dans une déclaration directe, le réalisateur partage : «bien sûr, je m’oppose fermement à la récente et injuste décision rendue à mon encontre, qui me contraint à l’exil. Cependant, le système judiciaire de la République islamique a rendu tant de décisions cruelles et étranges que je ne pense pas qu’il soit de mon ressort de me plaindre de ma condamnation».
Il demande par ailleurs un «soutien fort» de la communauté cinématographique mondiale aux réalisateurs menacés. «Comme je le sais par expérience personnelle, ce soutien peut leur être d’une aide inestimable pour poursuivre leur travail vital», poursuit-il.
Répression
Le réalisateur de 52 ans dit également craindre pour la sécurité et le bien-être des «nombreuses personnes [qui] ont contribué à la réalisation de [son] film». Il déclare que, «avant que les services de renseignement de la République islamique ne soient informés de la production de mon film, un certain nombre d’acteurs ont réussi à quitter l’Iran», mais que d’autres sont toujours sur place. Ceux-ci «ont subi de longs interrogatoires. Les familles de certains d’entre eux ont été convoquées et menacées».
«Possible» présence de Mohammad Rasoulof au Festival de Cannes
C’est également pour eux que le réalisateur demande le soutien de son milieu. «Les personnes qui affrontent courageusement et de manière désintéressée la censure au lieu de la soutenir sont rassurées sur l’importance de leurs actions par le soutien des organisations cinématographiques internationales», affirme-t-il. Parmi les personnes injustement condamnées par le régime pour avoir exercé leur liberté d’expression, il cite le cas du rappeur Toomaj Salehi, récemment condamné à mort pour «corruption sur Terre».
Selon le communiqué, Mohammad Rasoulof avait déjà été condamné à une peine de prison de juillet 2022 à février 2023, qui avait été écourtée après une amnistie générale accordée à des milliers de prisonniers en réponse aux manifestations qui agitaient alors le pays. Il était aussi interdit de sortie du territoire depuis 2017. Sa nouvelle condamnation est en lien avec la production de son nouveau film, The Seed of the Sacred Fig, qui sera en compétition officielle au Festival de Cannes et diffusé le 24 mai. La présence de son réalisateur à Cannes n’est pas assurée, sa localisation étant toujours tenue secrète. Sa fuite d’Iran «laisse entrevoir la possibilité» de sa venue sur la Croisette, suggère le communiqué.