Une cavalière s’avance dans le désert à travers des rangées d’épouvantails. Nimbée par les diffractions de chaleur, elle se dirige vers un lac. Elle descend de son cheval, emmitouflée dans un amas de draps noirs qui la font ressembler à un cosmonaute de Satan, exhibe un sein et le presse, versant un long nuage de lait maternel dans le lac, qui devient ciel, nuage, galaxie. A peine cinq ou six plans et déjà on est montés dans le grand train cosmique. Direction : total rodéo. Prochains arrêts : syncopes névrotiques, dîner familial qui vire à l’angoisse, sorciers encagoulés et bus scolaire arraché du sol à coups de trompettes.
Non, ce n’est pas un film posthume de Bruno Matteï, barde psychotronique du cinéma bis italien, ni le retour masqué de Leos Carax entouré de la famille Jodorowsky, mais le premier long métrage de Baloji, ancien MC du groupe de rap belge Starflam. Film irracontable où s’emmêlent, dans les rues de Kinshasa, les trajectoires de personnages aux vies troublées par les superstitions et la sorcellerie – un jeune homme venu de Belgique pour présenter sa fiancée à ses parents, sa sœur sur le point de quitter le Congo avec un petit-ami sud-africain volage, un gamin à la tête d’un gang vêtu de tutus roses.
Le résultat ressemble à une version afro-punk, occulte, débridée et bombée au rose fuchsia du Vitalina Varela de Pedro Costa. Mêmes tragédies sourdes, mêmes douleurs tues, mêmes aplats de noir charbonneux, mais secouées ici par d’imprévisibles explosions – pa