Le mieux est toujours d’entrer dans le noir et de ne rien savoir, dans l’idéal. Le noir c’est d’abord, avant le confort amniotique de la salle de cinéma, l’ignorance volontaire de ce qu’on s’apprête à voir. «Je ne veux rien savoir», sagesse du spectateur, premier commandement critique. Film de spectacle sur le spectacle, mais œuvre foncièrement réaliste, Un pays en flammes est le genre de documentaire qu’il vaut mieux découvrir à l’aveugle.
Si l’on poursuit quand même la lecture, son principe consiste dans l’enregistrement du rituel d’un feu d’artifice, cérémonie votive annuelle dans une forêt des Landes, qui ramène autant aux ensorcellements de l’enfance qu’aux origines du cinéma, au primitif et à l’art forain, et une approche de cinéma expérimental. Premier long métrage de Mona Convert, cinéaste issue des beaux-arts, il s’agit d’une magnifique œuvre au noir, anthropologique et sorcière, dont l’obscurité rend possible, désirable, la flambée progressive. Le film-flamme – même si au format numérique – se fraie une voie à l’échelle de la nature révélée parmi les ombres primordiales, fumées denses et gerbes lumineuses, étincelles à l’échelle d’un tronc d’arbre et du monde. On prend des risques à jouer avec le feu, mieux vaut connaître son métier.
Paysage à la frontière de l’invisible
Le film procède par étapes, des crépitements dans les arbres jusqu’au bouquet final, par cercles concentriques élargis. Se passe à peine plus d’une heure pour avoir une vue fugace, nyctalope, de l’endroit où l’on se trouve : «l