De part et d’autre des couloirs étroits éclairés encore au tungstène, l’enfilade des bureaux où la police des frontières mène les interrogatoires. Entre quatre murs, la table, quelques chaises, le plafonnier au néon. Alentour, une rumeur indistincte, quantité de bruits inidentifiables, réalistes ou aberrants (parfois une mitrailleuse ou un bombardement). Dans la nudité des plans et la condensation sonore, la parole et le découpage, tout est là, anonymement déployé sur une zone d’inconfort crescendo : Border Line, précis de fiction claustro et lino, huis clos d’aéroport. On se croirait à l’arrivée d’immigrés dans un pays en dictature, nous sommes dans la zone de transit de Miami, Etats-Unis, nation alors sous présidence Trump dont on entend dès l’ouverture la voix de canard atrabilaire vanter la construction du mur étanche à la frontière du Mexique.
Elena et Diego, jeune couple hispanophone – elle est Espagnole, lui Vénézuélien –, ne savent pas ce qu’ils fichent dans cette salle d’attente puis cette salle d’interrogatoire, dans ces limbes aéroportés. L’angoisse monte de discerner de quelle autorité – et de quelle suspicion – s’autorisent les uniformes face à eux, les assaillant de questions, dans cette subite remise en cause de leur «entrée en Amérique» pour une nouvelle vie. Cette zone frontière comme «no zone» délimite un entre-temps, un passage (obligé). Au bout : l’enfer ou le paradis après la purge administrative. Le film s’absorbe entièrement dans cette attente, l