L’émotion qui étreint devant la Mer au loin de Saïd Hamich Benlarbi vient de loin. Une fois qu’elle monte, elle ne s’arrête plus. Et elle te tient jusqu’à la fin. En l’attendant, une chose est sûre : c’est le film que le cinéma (des) français rêve de faire, de toujours (il y arrive parfois). Un film de personnages. Un film d’époques. Le temps qui file et puis l’amour. Toute la difficulté est dans l’équation : à la fois, suivre des personnages – pas seulement déterminés par leurs époques, pas réduits à des marionnettes de l’histoire et de la société, être vraiment avec eux, à leur côté, de leur côté. Et être aussi vraiment dans l’époque, la traverser, avec ampleur (ici, une décennie, les années 90) pour l’exprimer sans la perdre de vue dans les vies des individus. Saïd Hamich Benlarbi, cinéaste franco-marocain dont c’est le deuxième long métrage, présenté en séance spéciale à la Semaine de la critique, a trouvé sa solution à l’équation.
Ici, le rapport entre personnage et époque, c’est la musique. C’est elle qui exprime le lien entre les individus et les peuples, entre la liberté et l’histoire, entre la solitude et le destin, entre les baisers et les larmes. La musique, c’est-à-dire, dans la Mer au loin précisément, le raï, bande-son des années 90, algérien et franco-algérien, son d’Oran ou de Marseille, Cheb Hasni bien sûr, Cheb Nasro, Hamid