On nous dit que c’est un conte. Le dramaturge Jean-Claude Grumberg, auteur en 2019 du court livre dont la Plus Précieuse des marchandises est adapté, l’avait désigné par son sous-titre et écrit ainsi, retranchant le texte de tout mot et toute référence directe à ce que son récit évoque, la Shoah, de manière à le rendre lisible même aux plus jeunes enfants. D’emblée, Michel Hazanavicius se conforme à ce choix (Grumberg, ami de ses parents, cosigne d’ailleurs l’adaptation), installant son dessin animé dans une Pologne aux traits d’Epinal, vastes forêts voilées de neige croquées à la palette graphique d’où jaillissent ici et là des chaumières aux toits fumants. Aussi on sentirait presque défiler sous les doigts, alors que résonne la voix d’outre-tombe de Jean-Louis Trintignant, les pages épaisses d’un album pour les 5-8 ans.
Les deux protagonistes s’appellent Pauvre bûcheron et Pauvre bûcheronne. Ils survivent au fond d’un bois, fagotant, coupant des arbres, à la marge de la «guerre mondiale» qui se déroule loin d’eux. Or près de là où ils vivent, une voie ferrée voit souvent passer les trains. Pauvre bûcheronne, affamée, se poste chaque jour à proximité, implorant «les dieux du train» de lui laisser un petit quelque chose. Un jour, elle entend des cris de bébé dans la neige. Quelqu’un a jeté un tout-petit par la fenêtre ! Pauvre bûcheron, qui n’est peut-être pas aussi ignorant que nous l’a dit le conteur, comprend de quoi il en retourne. L’enfant n’est pas