Les gens avancent lentement, en se protégeant du soleil, les yeux plissés, on dirait qu’ils viennent d’être libérés des cachots. A volume inhumain, un remix disco patapouf du thème de Mission: Impossible fait trembler le Palais des festivals. Dans un mouvement parfait de tempo, une fille en robe à paillettes sort d’un restaurant, une dame qui revient du marché se met, quasiment par réflexe, à danser mollement. Au bout d’une allée, une attachée de presse en combinaison noire bouffante, impératrice de la planète Maléfices, lâche à son téléphone un sibyllin «je suis là mais je ne suis pas là». Cannes, 78e ça y est, c’est ouvert, les gens rentrent défilent, rampent et déboulent – sous le regard circonspect des retraités locaux qui, comme une provocation lancée à la face des festivaliers en nage, se tiennent glacés, immobiles, sanglés dans d’épaisses doudounes oranges.
A cette débauche de couleurs et d’énergies contraires, on ne pouvait répondre que par l’excès : lancer une pièce et pile, ce serait la mégastar omniprésente, face la jeune débutante habitée. La pièce est tombée sur la tranche alors ça a été Anamaria Vartolomei, à la croisée des deux. Incontournable et accessible, ingénue et impénétrable, capable, enjouée et très à l’aise, d’immédiatement vous tutoyer comme de passer d’interlocuteur en photographe avec l’assurance froide d’une grande professionnelle, mi-Romy Schneider, mi-Sharon Stone, à la fois Sylvidre et Fifi Brindacier. Enchaînant sans complications