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Libération
Critique

Cannes 2025 : «Enzo», transfuge de grâce

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Tout en finesse et en ambiguïtés, le long métrage posthume de Laurent Cantet, réalisé par son ami Robin Campillo, suit l’émancipation d’un adolescent de bonne famille qui se rêve ouvrier.
Le comédien Eloy Pohu, inconnu débutant, joue «Enzo» opaque et buté. (Les Films de Pierre)
publié le 14 mai 2025 à 9h00

Enzo, c’est si beau qu’on y repense encore, et l’on sait bien qu’un film-prénom a toujours de lourdes promesses à tenir. S’abstenir de nous conter un sujet, de viser un portrait d’époque ou même de génération, puisqu’il s’agit seulement de nous offrir un personnage à côtoyer. Peut-être même à tutoyer au-delà de la fiction, comme on croise désormais des Tanguy, archétype post-Chatillez, et des Rosetta post-Dardenne dans le réel. Un Enzo, on en a déjà rencontré, ce serait donc un de ces fils de la bourgeoisie «décrocheur scolaire», écœuré par le confort de son milieu. Ici, un adolescent qui se rêve maçon plutôt qu’héritier des privilèges de ses parents. Le comédien Eloy Pohu, inconnu débutant, le joue opaque et buté, les émois planqués dans la fausse nonchalance de ses 16 ans.

Emporté par un cancer en avril 2024 à 63 ans, Laurent Cantet n’aura donc pas eu le temps de tourner le film dont il avait achevé le scénario, le casting et les repérages en vue du tournage deux semaines plus tard. Enzo aurait pu s’éteindre aussitôt avec lui si son ami et collaborateur de longue date Robin Campillo, cinéaste lui-même (120 Battements par minute,