Ce n’est pas un hasard, l’Engloutie fait l’effet d’une légende sans âge qu’on se serait transmise oralement au coin du feu. Par exemple, dans un hameau enneigé des Alpes, où il se dit qu’un jour, le rude hiver aurait amené une femme venue de loin pour enseigner ce qu’elle sait aux enfants, menue silhouette blonde surgie du brouillard. Demoiselle célibataire, sachante, séduisante, donc forcément scandaleuse – il en faudrait moins, en 1899, pour être appelée sorcière.
C’est la craquante Galatea Bellugi, avec sa diction de môme à fossettes d’antan. Appelez-la plutôt Aimée Lazare, nom qui ne peut présager que d’histoires d’ensevelissement, de grottes et de tombeau d’où l’on ressort possiblement vivant. Ou alors Mestra, à l’image des petits élèves (quatre ou cinq, pas plus) qui viennent chaque jour prendre leur leçon chez elle, et qu’elle reprend d’un ferme «en français !» quand ils s’entêtent à lui parler patois. Le film se situe au tournant du siècle. Les hussards noirs de la République évangélisent à leur façon les confins ruraux d’une France peu alphabétisée, pétrie de superstitions locales, où rien ne vaut un rituel au sang de poulet pour se guérir d’une fièvre, et personne n’est trop pressé d’intégrer le savon à sa routine matinale.
En jeu, ces bonnes vieilles forces du moderne et de l’archaïque, de la nature et de la civilisation, qui imposent leurs volontés contraires au film et lui souffle son mystère de conte folk horror (sous-genre notamment r