C’était en 1978. Un temps de neige ou de gel. Ou les deux. On ne sait plus très bien. C’était jour de ciné au bahut, le lycée technique de Dole, sous-préfecture du Jura, où l’on se morfondait en faisant de la limaille. La prof de français nous avait promis un film qui se passait au pays, dans ces montagnes du Jura que l’on apercevait depuis la cour du lycée. Parfois, on devinait même la silhouette blanche du Mont-Blanc dominant la ligne sombre jurassienne. C’était signe de pluie à venir. «C’est quoi ce film ?», a demandé un grand gars à la voix rauque : «Passe-montagne de Jean-François Stévenin» s’est réjouie la prof. «Connais pas», a dit le gars. «Il est originaire de Lons-le-Saunier», a ajouté l’enseignante, comme pour nous convaincre. Ça nous faisait belle jambe à nous qu’il soit né à quarante bornes de là. Le troupeau des apprentis métallos a traversé mollement la cour du lycée, les mains dans les poches pour rejoindre ce que l’on appelait alors «la salle polyvalente», située au rez-de-chaussée d’un affreux internat quasiment borgne. Ils se sont vautrés sur les sièges grenat le plus loin possible de l’écran, histoire de roupiller tranquille. Le proviseur a dû faire un court speech en disant qu’il était très honoré que son lycée projette le premier long métrage d’un cinéaste jurassien. Autant dire qu’il pissait dans un violon pour nous autres qui avions emballé les filles du bac G1 (option secrétariat) lors de la récente sortie de
Billet
Comment «Passe-montagne» de Stévenin nous a changé
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«Passe-montagne» (1978), de et avec Jean-François Stévenin, avec également Jacques Villeret. (Les Films du Losange / France Regions 3/Collection Christophel)
par Jacky Durand
publié le 28 juillet 2021 à 12h27
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