Un souci de transparence ou une atteinte au secret des sources ? Reporters sans frontières (RSF) a dénoncé ce mercredi 5 juin «un risque d’atteinte au secret des sources», en réaction à une décision de justice sommant une société de production, accusée par Gérard Depardieu d’avoir manipulé des images de Complément d’Enquête, de remettre des enregistrements au comédien. Dans l’émission diffusée en décembre sur France 2, on voit l’acteur, visé par des accusations de viol et d’agressions sexuelles qu’il conteste, multiplier les propos misogynes et insultants envers des femmes et en prononcer d’autres à caractère sexuel lorsqu’une petite fille à cheval passe à l’image, lors d’un voyage en Corée du Nord en 2018.
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Gérard Depardieu, qui a assigné en justice France Télévisions et la société de production Hikari, souhaite prouver que ses propos ne visaient pas la petite fille. La semaine dernière, le tribunal judiciaire de Paris a ainsi ordonné à Hikari de remettre les enregistrements «correspondant strictement à la séquence filmée […] dans le haras», invoquant un «souci de transparence» et ne jugeant «pas avérée» une atteinte au secret des sources. La société Hikari a fait appel de cette décision et France Télévisions s’est associé à cette démarche.
Confidentialité des sources
Dans un communiqué publié sur son site mercredi, Reporters sans frontières a demandé «à la cour d’appel d’annuler» cette décision «qui menace la confidentialité des sources des journalistes», estimant que «le procès intenté par Gérard Depardieu» n’est «pas une simple affaire de transparence entre deux parties d’une procédure». «La décision de contraindre les journalistes à fournir leurs rushes [images brutes, sans montage, ndlr] au-delà de l’extrait diffusé» pourrait «faire jurisprudence et aggraver le risque d’atteinte» au «principe fondamental» du secret des sources, poursuit Thibaut Bruttin, adjoint au directeur général de RSF, cité dans le communiqué.
«Nous demandons à la cour d’appel de prendre la mesure des implications d’une telle décision», insiste-t-il. L’ONG rappelle plus largement que les menaces pesant sur le secret des sources, «pierre angulaire de la liberté de la presse», sont revenues sur le devant de la scène en France en septembre 2023. Ariane Lavrilleux, une journaliste collaborant avec le média d’investigation Disclose avait alors été placée en garde à vue et a vu son domicile perquisitionné dans le cadre d’une information judiciaire pour compromission du secret de la défense nationale, après une série d’articles sur des ventes d’armes françaises à l’étranger et le possible détournement par l’Egypte d’une mission française de renseignement.