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Exposition

Dana Schutz, ubuesque roi

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Dans une monographie fournie, le musée d’Art moderne de Paris expose l’œuvre de la peintre américaine adepte de la satire sociale et du grotesque.
«Sneeze» réalisé en 2001 et «Face Eater» en 2004. (Jason Schmidt/Dana Schutz)
publié le 30 octobre 2023 à 4h44

Au début de l’exposition – et donc de la carrière de l’artiste, au seuil des années 2000, le musée d’Art moderne optant à raison pour un accrochage chronologique –, une petite peinture de Dana Schutz livre d’emblée l’amorce de ce qui va suivre. Elle saisit, à la volée, une jeune fille en train d’éternuer, le visage déformé sous la violence du choc, le nez retroussé d’où gicle, jaunâtre et verdâtre, une morve épaisse qui finit par écumer en filaments bleus sur son pull rouge. Il fallait que ça sorte… L’artiste assimile la matière picturale à une humeur visqueuse et la création artistique à un besoin vital qui ne se contrôle pas. Dans ce registre grotesque, surprenant et comique, l’Américaine met en scène des cohortes de personnages aux pulsions étranges, prêts à tout casser ou se creusant la tête pour tout reconstruire. A commencer par des corps démantibulés, dont les membres, le tronc ou un sac d’os, gisent sur une table, au sol ou sur des étagères. A leur chevet, des jeunes gens s’affairent pour remodeler leur silhouette. Dans Twin Parts (2004), c’est la créature, siamoise, en morceaux qui s’en charge elle-même. Pas très adroite, elle a l’air dubitative sur la marche à suivre pour colmater ses brèches.

Ceinture d’explosifs

De toute façon, les compositions de Dana Schutz ne cherchent pas à mettre de l’ordre dans cette folie collective qui énerve ses sujets. Au point, que dans Face Eater (2004), l’un d’eux se mange le visage, engloutissant son nez et ses yeux dans une bouche grande o