Le Liban est à nouveau plongé dans le chaos. Mais la situation du pays, avant même ce retour de haute conflictualité dans sa partie sud, ne s’est jamais restabilisée depuis l’explosion en août 2020 de 2 750 tonnes de produits chimiques entreposées dans le port de Beyrouth, ravageant une partie de la ville et faisant plus de 200 morts. Symbole s’il était nécessaire de la décadence et de la corruption des élites ayant sciemment laissé rôtir au soleil pendant six ans cette bombe à retardement, l’évènement et ses effets ouvrent le making-of du film, alors en préproduction, Costa Brava, Lebanon de Mounia Akl.
Est-il encore seulement envisageable de le tourner après pareil traumatisme ? La production, la cinéaste, l’équipe des comédiens et les techniciens décident de s’accrocher au projet. Le film montre alors l’invraisemblable course d’obstacles que va représenter la mise en boîte du long métrage qui traite par ailleurs directement de la question d’un pays au bord du gouffre. On est en plein Covid, les financements fondent avec la dévalorisation de la monnaie, l’électricité est coupée, le comédien principal, le Palestinien Saleh Bakri est retenu à l’aéroport en proie aux vérifications tatillonnes des autorités, la forêt brûle à l’orée du décor…
A travers l’expérience concrète pleine de soucis pratiques mais aussi étrangement déphasée du tournage, Cyril Aris montre les prouesses d’un collectif surmotivé au cœur d’une gabegie nationale absolument démotivante. Le film terminé sera montré à la Mostra de Venise et il est sorti en France à l’été 2022. Mounia Akl, pour sa part, a fini par quitter le pays pour s’installer à New York.