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«De la guerre froide à la guerre verte», terres de terreurs

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Dans un film passionnant et dépassionné entre le Paraguay et le Brésil, la documentariste Anna Recalde Miranda retrace l’histoire des massacres et dévastations d’une Amérique du Sud des années 70.
Dans un deuxième temps, la documentariste arpente les horizons sans fin de plantation de soja. (VraiVrai Films)
publié le 25 mars 2025 à 17h00

«Un autre monde est possible», rappelle la voix off et lasse de la cinéaste, slogan des luttes dont elle sait l’incantation dépassée. De la guerre froide à la guerre verte est une invitation au voyage alternatif, aux ténèbres conradiennes, antitouristiques, à travers le temps politique des dictatures. Film lui-même (vu l’ampleur du sujet) d’une durée assez brève : une heure quarante-cinq à arpenter le passé et le présent d’un continent, cette Amérique du Sud des années 70 que des tortionnaires mandatés, aux ordres d’autocrates en uniforme et du gouvernement des Etats-Unis, bras armés des grands colonisateurs terriens de l’agro-industrie, ont mis à feu et à sang sous le nom générique, tragiquement légendaire, d’opération Condor et des escadrons de la mort.

A cheval sur deux pays et une frontière, le Paraguay et le Brésil, et entre deux destins brisés (on ne se remet pas de l’apparition-disparition stupéfiante du baroudeur anarchiste Paul Z. Simons), Anna Recalde Miranda, documentariste italo-paraguayenne, réalise un film passionnant et dépassionné, ni brûlot révolutionnaire ni manuel du bon humanitaire. Le cinéma comme action militante présente et tombeau à la mémoire ignorée des vaincus.

Témoins d’hier et partisans d’aujourd’hui

Miranda a multiplié les allers et retours au Paraguay sur les traces de son arrière-grand-père fermier, fondateur du parti socialiste d’un pays que la famille a fui avec la prise de pouvoir par la dictature militaire de Stroessner (1954-1989). Caméra au poing et micro tendu, la j