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Libération
Errance

«Desert of Namibia», aimer et perdre la raison

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Le second long métrage de Yoko Yamanaka esquisse avec justesse le quotidien d’une jeune femme insouciante qui glisse peu à peu vers le zarbi et la psychose.
Kana, jeune fille mouvante qui, comme le sable, vous file entre les doigts. (Eurozoom)
publié le 13 novembre 2024 à 6h43

Desert of Namibia, film doux dur dingue. Le genre dont on ne sait longtemps ce qu’il nous veut ni où il va – si c’est bien son problème d’ailleurs, d’aller quelque part. Disons qu’il va vers son titre et vers son risque : sa retraite, son désert. On n’est pas près d’oublier l’énigme ocre qu’est Kana, héroïne opaque, jeune fille mouvante qui, comme le sable, vous file entre les doigts, ni le plan au générique de fin de ce deuxième film signé Yoko Yamanaka, 27 ans. Dans une quiétude de fin du monde, le livestream du portable de Kana figure plein champ l’oasis irréelle où s’abreuvent des animaux sublimes : les oryx gazelles.

Yamanaka dit que ce portrait de fille d’abord vive et insouciante, de plus en plus erratique, zarbe, borderline, s’inspire en partie d’elle. Kana, sa part d’autofiction, est comme la réminiscence d’un Nous ne vieillirons pas ensemble relocalisé chez des millennials au Japon. Un cinéma de crise conjugale renouvelé, du point de vue du personnage féminin quittant son petit ami pour son amant qui a exigé en minaudant qu’elle rompe. Kana, pas plus que ne l’était Jean Yanne chez Pialat (référence revendiquée par Yamanaka), n’est pas sympathique. Etre changeant – belle, livide ou maladive, selon –, sa présence et sa cohérence comptent moins que la façon dont elle s’absente et dévie à répétition, toute d’ellipses et d’intermittences, instable au monde et aux garçons qui l’aiment aussi mal qu’elle. C’est une question intéressante de cinéma