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«Dressé pour tuer» de Samuel Fuller, bête de film

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Chef-d’œuvre sur le racisme, le film du cinéaste américain de la violence sorti en 1982 sur un chien dressé pour attaquer et tuer fait la part belle à la mise en scène et à l’hybridation des genres.
L’homme et la bête se toisent. Lequel des deux aura raison de l’autre ? (Paramount Pictures/Photo12. AFP)
publié le 29 mars 2025 à 11h04

Comme souvent chez Fuller, Dressé pour tuer (1982) tend jusqu’à son terme vers une limpidité percutante, un face-à-face frontal : un chien blanc, un homme noir dans une cage, un combat de gladiateurs dans une arène. L’homme et la bête se toisent. Lequel des deux aura raison de l’autre ? Le berger blanc suisse qui fut conditionné dès son plus jeune âge par un maître raciste pour attaquer les personnes de couleur ? Ou Keys (excellent Paul Winfield) qui face à lui tente depuis des semaines de le déprogrammer à force de patience, de ruse et de corps à corps ? L’animal va-t-il fondre sur lui babines retroussées et le déchiqueter comme le malheureux gisant en lambeaux dans une église, sous le vitrail (ô ironie) de saint-François d’Assise, l’ami des bêtes ? Ou bien déplisser son insondable regard, ne plus réagir à la couleur de peau et lécher la main noire qu’on lui tend ?

C’est si simple que l’allégorie en devient littérale. Le racisme relevant d’un comportement acquis, peut-il être vaincu par l’éducation ? Au-delà de cette question, un être qu’on a conditionné à attaquer – et un soldat qu’on entraîne lui aussi dressé pour tuer –, peut-il se défaire de cette pulsion de mort ? Le dernier plan zénithal sur la dépouille du chien gueule ouverte maculée de sang ne laisse aucune place à l’optimisme et c’est au contraire une infinie tristesse qui traverse tout le film, port