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Cannes Première

Festival de Cannes 2024 : «C’est pas moi» de Leos Carax, c’est tout lui

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Ego trip brouillon du cinéaste suite à une commande du centre Pompidou pour une exposition qui n’a finalement pas eu lieu.
Je pense donc je suis, je pense pour dire qui je suis, moi, «LC», et qui je ne suis pas. (Les films du Losange)
publié le 19 mai 2024 à 15h46

«Ça tourne.» Blocs de polices épaisses à l’écran, couvrant une danseuse virevoltant sur le pont de Bir-Hakeim. C’est pas moi est un film qui cogite, vite, fort, trivialement, lourdement, légèrement, sérieusement. Je pense donc je suis, je pense pour dire qui je suis, moi, «LC», et qui je ne suis pas. Je réponds à une commande du centre Pompidou qui, à l’occasion d’une exposition annulée, m’avait posé la question : «Où en êtes-vous, Leos Carax ?». Comme dans ces films qu’on regarde distraitement, casque sur les oreilles, sur l’écran d’une télé posée dans le couloir d’un musée, je pense les images, le cinéma, mon cinéma. Je joins les fulgurances aux obscénités. Je parle de cet œil des dieux du cinéma classique, si imposant que personne ne s’interrogeait sur sa présence, avant de glisser sur les garçons qui harcèlent les filles avec l’objectif de leur smartphone. Je m’associe à Roman Polanski, homme du XXe siècle («moi aussi»), j’assume une saynète mettant en scène une mère lisant à ses deux bambins l’histoire de la solution finale comme un conte, je mêle des images d’actualité rapportant une performance des Femen, et le nom d’Oksana Chatchko, à un porno vu de biais. Je m’invente une voix grave, et grasse, comme une parodie de celle de Godard (que je fais apparaître dans mon film aussi, en photo, et en message téléphonique). J