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Libération
Intimité

Festival de Cannes: «Armageddon Time», ange déçu

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Dans un film au cordeau, James Gray fait l’autoportrait presque cruel de son adolescence.
Le jeune Paul Graff (Banks Repeta) est né dans la classe moyenne juive du Queens, petit-fils d’un réfugié dont la mère avait fui les pogroms en Ukraine (Anthony Hopkins, magistral). (DR)
publié le 19 mai 2022 à 20h55

Un titre grandiose, un petit film. Mais peut-être est-ce la plus belle qualité du huitième long métrage de James Gray, Armageddon Time, sa cinquième sélection à Cannes, que d’être dans une modestie qui sied au cinéaste, une intimité dont il sait comme personne dessiner les contours. Resserrant son propos vers une poignée d’essentiels – la famille, son histoire, ce que l’on trahit et qui nous constitue – il livre son autoportrait downtempo d’artiste en pré-ado sous forme de retour sur soi anti-héroïque voire cruel. La rumeur bruissait d’un film des années 80 placé sous l’hégémonie de Fred Trump (le père de, magnat de l’immobilier qui règne alors sur le Queens à coups de largesses) mais Armageddon Time, planté à l’orée du Reaganisme, est bien plus impressionniste.

L’époque est filtrée par une subjectivité, celle du jeune Paul Graff (Banks Repeta), dont le nom a la même simplicité trompeuse que celui de James Gray, né dans la classe moyenne juive du Queens, petit-fils d’un réfugié dont la mère avait fui les pogroms en Ukraine (Anthony Hopkins, magistral). N’est gardé de l’époque que ce qui sert à l’intrigue – l’intérieur lino-lambda d’une maison dont Paul rêve de s’échapper, la fin du disco et de ses rêves d’émancipation, la naissance du bruit de fond néolibéral, avec son bagage de népotisme