C’est le bout du roul. On a tiré sur la corde. On a vu quatorze longs et mille personnes par jour. On a loupé le film de 8h30 après avoir payé une dernière bière à Frank Ocean au Vertigo, le lupanar de la Queer Palm. On a perdu des roues de vélo sous la pluie sur les pentes à 50°C du Suquet pour rattraper le quatrième biopic de requins d’Un certain regard. On a fait un black-out de notre anglais en tentant de serrer la main de Daniel Kaluuya. On a fait physio à la fête de la Quinzaine et failli refouler Albert Serra. On a croisé Jérémy Strong à la sortie du Palais en costume en lin Uniqlo. On a pleuré des larmes de joie devant le Bi Gan et des larmes de sang devant Alpha. On a parlé de cinéma. De quoi ?
Les films du jour
On aime bien
Jeunes Mères des frères Dardenne. En compétition. Suivant des ados recueillies dans un centre pour mères en difficulté, les cinéastes belges signent un film inégal mais émouvant. «Jeunes Mères» des frères Dardenne, le cœur et les poupons
On aime un peu
Un poète de Simón Mesa Soto. Le film de Simón Mesa Soto et ses personnages, un écrivain alcoolo et l’adolescente qu’il veut pousser à devenir poète, inventent un nouveau mauvais goût. «Un poète», en vers et contre tout
On est déçus
The Mastermind de Kelly Reichardt. En compétition. Le long métrage de la cinéaste américaine sur la cavale d’un petit voleur d’art est desservi par son burlesque trop bridé et son image délavée. «The Mastermind», cavale fade
On aime pas
La Venue de l’avenir de Cédric Klapisch. Hors compétition. Présent à Cannes pour la première fois, le cinéaste sert une histoire de famille et de bons sentiments qui rêve d’un Paris pittoresque et gouailleur. «La Venue de l’avenir» de Cédric Klapisch, prévisible sur toute la lignée
On redécouvre
Merlusse de Marcel Pagnol. Cannes Classics. Le Festival restaure une œuvre méconnue du cinéaste dans un pensionnat où se côtoient rencontre un professeur disgracieux et des enfants ni idéalisés ni diabolisés. Marcel Pagnol et un «Merlusse» enchanteur
Portrait cannois
Daniel Kaluuya
Juré pour la Semaine de la critique, le flegmatique acteur londonien, 36 ans et déjà oscarisé, veut continuer à réaliser ses propres projets. Daniel Kaluuya, la mélodie du bosseur
En direct
Fatma Hassouna. «Ce n’est pas facile pour moi d’être là, dans cette bulle d’indifférence, attaque Francesca Albanese, rapporteuse spéciale des Nations unies sur les territoires palestiniens occupés. Ça me paraît surréaliste de voir ces festivités pendant que des enfants sont affamés à mort.» Ce vendredi 23 mai, sous un soleil de plomb, quelques dizaines de personnes se pressent sur la moquette rose du Village international, devant le pavillon palestinien. C’est là que se tient une conférence de presse d’hommage à la mémoire de la photojournaliste palestinienne Fatma Hassouna et visant à alerter sur la crise humanitaire en cours dans la bande de Gaza sous blocus israélien. «Il faut profiter de la visibilité de Cannes pour briser le silence» : contre l’horreur à Gaza, des voix s’élèvent sur la Croisette
Queer Palm. Cette année, la Queer Palm, prix trans-sélections qui récompense une œuvre LGBT + en marge du Festival de Cannes, fête ses 15 ans. Quinze ans à s’imposer dans le paysage cannois, de montées des marches en fêtes, à se financer à la force des bras et à devoir composer avec les frilosités du milieu – dans une interview à Télérama il y a quelques jours, le président du jury de l’édition 2025, Christophe Honoré, évoquait notamment le cas d’un film de la sélection qui aurait paniqué à l’idée d’avoir «un tampon Queer Palm». Le président et fondateur du prix trans-sélections créé en 2010, Franck Finance-Madureira, fait le point pour Libé sur les avancées et résistances passées et à venir.
Palm Dog. La Palm Dog a été remise ce vendredi à Panda, le berger islandais de The Love That Remains d’Hlynur Palmason (Cannes Première) et le prix du jury est revenu quant à lui aux formidables Pipa et Lupita dans Sirât d’Oliver Laxe (en compétition), que le réalisateur, accompagné de l’actrice Jade Oukid sont venus recevoir. Pipa et Lupita n’étaient pas présents mais Oliver Laxe a diffusé un court film de répétitions où l’on pouvait voir les deux chiens jouer ensemble. Emotion. Notre envoyé spécial à la cérémonie a par ailleurs été jaloux du foulard motif chiengs offert au lauréat.
Projo privée
Catherine Deneuve : «Tous les films d’Hitchcock en savent long sur moi»
L’actrice n’a pas de film à Cannes cette année mais son nom vient d’apparaître aux côtés de Léa Seydoux au côté des 900 autres signataires de la pétition sur l’horreur de Gaza publiée par Libération en début de Festival. Libé lui a soumis son questionnaire cinéphile.
Le Palmarès rêvé du Libé Cannes crew
Avant la cérémonie de clôture du 78e Festival samedi et le verdict du jury présidé par Juliette Binoche, la team culture dresse son palmarès idéal, parce qu’on a bien le droit de rêver. Notre palme d’or, et bien plus encore, c’est par ici.
La playlist
Cette année un peu plus que les précédentes, on aura beaucoup fredonné devant les films des différentes compétitions. Aussi on s’est fait pour nous même une petite playlist récap, qu’on ne résiste pas à l’envie de vous partager.
- Robert Wyatt, Little Red Riding Hood Hit The Road (dans Fuori de Mario Martone)
- Tom Zé, O riso e a faca (dans le Rire et le Couteau de Pedro Pinho)
- Kangding Ray, Amber Decay (dans Sirat d’Oliver Laxe)
- Elly Etmanetoh, Nawal Al Zoghbi (dans Once Upon a Time in Gaza de Tarzan Abu Nasser et Arab Nasser)
- Terry Callier, Dancing Girl (dans Valeur sentimentale de Joachim Trier)
- Sophie Letourneur et Philippe Katerine, l’Aventura de Stone et Charden (dans L’Aventura de Sophie Letourneur)
- Bobbie Gentry, Courtyard (dans Eddington d’Ari Aster)
- Dalida, Tu me donnes (dans Nouvelle Vague de Richard Linklater)
- Chicago, If You Leave Me Now (dans l’Agent secret de Kleber Mendonça Filho)
- Zé Ramalho e Lula Côrtes, Culto a Terra (dans l’Agent secret de Kleber Mendonça Filho)
- Fontaines DC, In the Modern World (dans Nino de Pauline Loquès)
- La Bouche, Be My Lover (dans Yes de Nadav Lapid)
Point critique, le quiz
Le jeu est simple : on vous donne un extrait d’une critique ciné parue dans Libération à l’époque, à vous de retrouver de quel film il s’agit !
«Sur le mode étriqué de la bassine de larmes amères poids Panzer, se raconte le drame d’un pauvre type de Newcastle. […] Désolante idée du cinéma que celle-ci qui n’a que des choses à démontrer et jamais rien à montrer.»
- Moi, Daniel Blake de Ken Loach
- Secrets et Mensonges de Mike Leigh
- Le vent se lève de Ken Loach
- Bird d’Andrea Arnold
Et demain ?
Rendez-vous demain soir en direct sur Liberation.fr pour le Palmarès officiel que l’on commentera à chaud en espérant voir nos chouchous de cette édition trouver une place au soleil avant clôture des festivités, remballage du tapis rouge et retour à la vie normale.