Spotted ces dernières vingt-quatre heures : l’immense Catherine Deneuve, the Queen, en pleine lecture de Libé dans un train filant vers le Sud (difficile de trancher, à vue de nez, si elle était plutôt sur l’interview François Ruffin ou les pages Cannes). Voilà qui est de nature à remonter à bloc le moral des troupes qui doivent désormais faire «partage connexion» pour essayer de câbler trois derniers neurones encore valides au milieu d‘une vaste zone cognitive en ruines où clignote en lettres néon cassées : «Pas bon le film.»
A J-4 du palmarès qui sera révélé samedi 24 mai, difficile de se risquer au moindre pronostic tant la sélection a jusqu’à présent démontré une forte disparité de style, de conception du cinéma et que l’on n’est pas sûr d‘avoir vu s’aligner les planètes sur un film en particulier, se dégageant du magma en fusion comme une évidence. Si on se réfère au tableau des critiques européens que publie Screen, Un simple accident de Jafar Panahi prend le lead, une grille équivalente mais rassemblant les critiques chinois donne elle la note la plus élevé à Sirat d‘Oliver Laxe. Mais rien n’est encore joué.
Les films du jour
On aime beaucoup
Vie privée de Rebecca Zlotowski. Hors compétition. Rebecca Zlotowski imagine une psychanalyste, campée par l’actrice américaine, enquêtant sur le suicide d’une patiente, dans un thriller réjouissant et profond. «Vie privée», psy pour cible
Romería de Carla Simón. En compétition. L’Espagnole Carla Simón suit une jeune femme qui enquête sur la jeunesse de ses parents emportés par le sida. Un film sobre, inspiré de sa vie. «Romería» met l’absent sur la maladie
Militantropos de Simon Mozgovyi, Yelizaveta Smith et Alina Gorlova. Quinzaine des cinéastes. A Cannes pour présenter leur film collectif aux allures de manifeste, le collectif de cinéastes aborde le tourbillon du Festival avec distance mais plaisir. Rencontre
On aime un peu
Lucky Lu de Lloyd Lee Choi. Quinzaine des cinéastes. Contre-portrait de la ville loin de sa légende rutilante, le premier long métrage du cinéaste suit un livreur à vélo dans la frénésie urbaine. «Lucky Lu», un poisseux pilote dans les rues de New York
On aime bof
Eleanor the Great de Scarlett Johansson. Un certain regard. D‘abord passionnant, le premier long métrage de l’actrice, sur une vieille Américaine s’appropriant l’histoire d‘une amie déportée lors de la Shoah, finit par tomber dans le mélo banal. Dommage. «Eleanor the Great», à fleur de pipeau
On n’aime pas
The History of Sound d‘Oliver Hermanus. En compétition. Le film d‘Oliver Hermanus sur deux amants passionnés de musique folk dans les années 1920, interprétés par Paul Mescal et Josh O’Connor, ne parvient pas à créer l’émoi. «The History of Sound», la cage au folk
On déteste
La Disparition de Josef Mengele de Kirill Serebrennikov. Cannes Première. Flou dans ses ambitions, le biopic de Kirill Serebrennikov sur le destin maintes fois imaginé du nazi nous perd dans son formalisme et ses accès d‘indécence. «La Disparition de Josef Mengele», cause et inconséquence
La rencontre
L’actrice américaine évoque son premier grand rôle en français dans le long métrage de Rebecca Zlotowski, présenté hors compétition à Cannes, et sa place dans l’industrie du cinéma. «Aux Etats-Unis, on n’a pas la liberté de faire des films comme «Vie privée», tout doit rentrer dans une case»
En direct
Etre ou ne pas être. Le magazine le Film français l’annonce sans autre précaution oratoire : «Guillaume Canet sera Robert Badinter.» Pas «jouera», non, «sera» ! Le biopic est en phase de production entre Iconoclast et Pathé et devrait être signé par Simon Jacquet, monteur de l’Amour ouf et de Bac Nord. Un autre projet Badinder était déjà annoncé et devait être réalisé par Pierre Godeau. Dans la catégorie «laissez nos grands hommes en paix», rappelons que Gilles «amourouf» Lellouche «sera» Jean Moulin devant la caméra de László Nemes (le Fils de Saul).
Premier palmarès. Chaque année, la Semaine de la critique est la première sélection parallèle à dégainer son palmarès. Présidé par le cinéaste espagnol Rodrigo Sorogoyen, le jury de la 64e édition a choisi d‘honorer A Useful Ghost de Ratchapoom Boonbunchachoke (Grand Prix AMI Paris), Imago de Déni Oumar Pitsaev (Prix French Touch) et Théodore Pellerin (Prix Fondation-Louis Roederer de la révélation) pour son rôle dans Nino de Pauline Loquès.
Portrait cannois
Eternel ado à 36 ans, d‘une maladresse irrésistible, Michael Cera, à l’affiche du dernier film de Wes Anderson, évoque ses envies de mise en scène. Michael Cera, gauche adroit
Restons palme
Romería, le Mystérieux Regard du flamant rose, Alpha… Le VIH est le sujet de plusieurs films sélectionnés, au risque d’être traité de manière abjecte. Notre billet
Point critique, le quiz
Le jeu est simple : on vous donne un extrait d‘une critique ciné parue dans Libération à l’époque, à vous de retrouver de quel film il s’agit !
«C’est tout ce qui fait la sève de ce film, blockbuster contre-nature sur le déclin, le détachement et l’apaisement, bulldozer frappé du sceau de George Lucas qui se permet une sortie à la Capra.»
- Dune de Denis Villeneuve
- Star Wars, épisode III : la Revanche des Sith de George Lucas
- Indiana Jones et le cadran de la destinée de James Mangold
- The Lost World : Jurassic Park de Steven Spielberg
Et demain ?
Dans la compétition, deux films très attendus sont projetés. Tout d‘abord Woman and Child de l’Iranien Saeed Roustayi, découvert avec la Loi de Téhéran puis Leila et ses frères. Le personnage principal est une infirmière de 40 ans élevant seule ses enfants et qui, au moment de se marier, est confrontée à un événement tragique. L’autre événement du jour sera la découverte de Résurrection de Bi Gan, cinéaste chinois qui avec deux longs métrages (Kaili Blues puis Un long voyage vers la nuit), s’est imposé comme un incomparable styliste. Ce film de science-fiction de 2h40 est un des secrets les mieux gardés de la production internationale.