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Drame

«Francisca» de Manoel de Oliveira, anatomie du cœur

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Elément de la tétralogie dite «des amours frustrées», le chef-d’œuvre du cinéaste portugais tourné en 1981, splendide premier film de la plénitude au sein d’une filmographie libre, ressort en salles.
Un univers tissé de frustration, et du plaisir trouble, morbide, qu’on en retire. (Epicentre Films)
publié le 15 juillet 2023 à 14h55

Le jeune cinéaste qui tourne Francisca en 1981 a 72 ans. Il est né en 1908 et s’il est jeune encore, c’est qu’il a peu tourné : le Portugal de Salazar depuis les années 30, dictature peu soucieuse de production d’avant-garde, ne fut pas propice à ce cinéaste dandy et grand bourgeois, érudit, catholique et marié, Manoel de Oliveira. A la «révolution des œillets», en1974, l’œuvre commence vraiment, il reste à Oliveira quarante années à vivre et une trentaine de longs métrages à tourner.

Francisca, film magnifique, insolent et classique, expérimental et désuet, auprès duquel n’importe quelle audace d’aujourd’hui fait pâle figure, est le premier film totalement «accompli» du cinéaste, celui qui pose le style en toute rigueur et voit une sombre folie se déployer, jetant les bases solides de la maîtrise propre à Oliveira, ferme et gazeuse, terrienne et éthérée. Il faut avoir vu Francisca et en revoir à intervalles réguliers la splendeur mobile sous la fixité, les fulgurances sous l’aplomb des gravures de mode. Le premier film de la plénitude donc, en dépit, de part en part, des beautés à couper le souffle des films précédents, et par exemple ceux avec lesquels Francisca forme la tétralogie dite «des amours frustrées» : le Passé et le Présent, Benilde et Amour de perdition. Il faudra encore à l