Deux jeunes filles de l’Eglise mormone, sœur Barnes et sœur Paxton, colportant la bonne parole à vélo dans un bourg perdu du Colorado, frappent à la porte de la demeure de Hugh Grant. L’orage gronde au loin. Hugh Grant, c’est Hugh Grant toujours, entre l’écarquillement de Stan Laurel et le beau gosse. Il a les mots choisis, l’éloquence anglaise, il a joué dans l’Amour sans préavis avec Sandra Bullock. Autant le dire : il inspire confiance. Les missionnaires brune et blonde acceptent son invitation à entrer et manger de la tarte aux myrtilles.
De fil en aiguille cosy, entre les trois à la bougie, s’engage un dialogue philosophique – au sens que donnaient au genre les auteurs des Lumières. Vite la parole devient de plus en plus malsaine, retorse, grand exercice de rhétorique qui oppose aux deux croyantes M. Reed, ce diable sceptique les incitant poliment à reconsidérer leurs croyances, leur foi et leur église. Elles sont tombées dans le panneau et dans la gueule du loup. Le loup se met à déblatérer brillamment : démontre par exemple que le Monopoly et le monothéisme sont deux faces de la grande supercherie. Loup Grant prend la parole pour terrifier, son seul pouvoir est de séduction et déduction des mots, son langage métaphysique de mère-grand : Heretic est le film d’horreur le plus dialogué jamais fait, suivi par le Silence des agneaux, et l’objet de son huis-clos est la puissance de la parole. Son empire et son emprise, suggestion et sujétion. Ce s