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Libération
Premier film

«Kyuka» en état de Grèce

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Sensible, ingénieuse et inventive, la réalisation de l’autodidacte Kostis Charamountanis apporte, à un récit de vacances en famille, une profondeur inattendue.
En 2024, lors de sa projection en marge du festival de Cannes, «Kyuka» avait déjà plu pour son inventivité et la technique de son réalisateur. (The Dark)
publié le 15 avril 2025 à 22h11

Ça commence comme un film d’été : il fait beau, la mer scintille, le père empile les provisions sur le quai. Babis (Simeon Tsakiris), casquette de loup de mer vissé sur le crâne, emmène Konstantinos (Konstantinos Georgopoulos) et Elsa (Elsa Lekakou) en mer. Le soleil fait éclater les bleus et blancs, Elsa a la nausée, Babis bouge avec des gestes sûrs : tout tient du rituel immuable, le voilier a quelques étés au compteur, l’image carrée distille un goût de souvenir. Kyuka, avant la fin de l’été vogue vers l’île de Poros en embarquant cette famille et nos attentes, qui tournent autour du temps suspendu et des sens en éveil, des éclats de vie qui comptent triple. Peut-être du badinage amoureux, de la révélation. Le film d’été a souvent le goût de l’innocence envolée et du retour au port déniaisé.

Mais assez vite, quelque chose désaxe légèrement la croisière. Peut-être la musique de Tchaïkovski, si grave. Peut-être la plastique du film, stylisée et de plus en plus hachée. Peut-être la complicité loufoque, presque surnaturelle, entre les deux jeunes, dont on comprend tard qu’ils sont jumeaux. Ils font durer leur enfance alors qu’ils semblent déjà adultes. Quelque chose s’est passé qui l’a prolongée.

Au mouillage les scènes se succèdent, impressionnistes, flashs d’été sur fond de chant de cigales. Les jumeaux viennent en aide à une petite fille qui ne trouve pas sa mère. Ils appliquent consciencieusement du vernis à ongles et dansent sous les pins. Konstantinos rencontre une