Mo Harawe dit que le vent est un des personnages de son film, c’est frappant à quel point c’est vrai : cette force aérienne a rarement été filmée de cette façon, directe et lyrique à la fois. Non seulement captée, mais mise en scène. Comment on met en scène le vent ? A l’image, on le laisse s’engouffrer dans les plans, comme dans les maisons – s’agiter dans les rideaux, les vêtements qui pendent, les tissus qui couvrent le corps des personnages. On le regarde faire trembler les murs de tôle, claquer les portes, soulever le sable du désert. Au son, on le laisse siffler, fredonner, râler, taper, racler, s’insinuer partout sur les pistes, sur la bande sonore, couvrir les dialogues ou accompagner les voix, comme la musique se mêle au chant. Si le vent est donc un des personnages – au même titre qu’Araweelo (Anab Ahmed Ibrahim), la sœur qui vient de divorcer, ou que son frère Mamargade (Ahmed Ali Farah), plus tout jeune, vivant de boulots ici et là, ou que le fils de celui-ci, l’enfant Cigaal (Ahmed Mohamud Saleban), qui se retrouve au pensionnat quand l’école de son village ferme – il est aussi ce qui circule entre eux, ce qui court de l’un à l’autre, ou fait le lien quand ils s’éloignent ou par moments ne s’entendent pas.
Bien déterminé à provoquer un plaisir visuel intense
Le vent, élément incorporel, rend par une sorte de paradoxe palpable les relations entre les êtres, il incarne tout ce qui ici relie les choses et les personnes : un peu comme le film qu’on regarde, et qui lui aussi fait le lien, ou comme un alter ego du cinéas