«Il faut se laisser aller dans la vie comme un bouchon dans le courant d’un ruisseau», philosophait Pierre-Auguste Renoir, le peintre. Théorie dite du «p’tit bouchon» reprise par Jean, le fils, le cinéaste, qu’il faut entendre autant au sens littéral de films tournés au fil de l’eau, que pour justifier parfois de l’injustifiable – ainsi des vilenies antisémites de Renoir aux premiers temps de la collaboration vichyste (dont entre ces pages Louis Skorecki s’était fait, pour mémoire, l’écho insistant). Dans le Voyage en pyjama – au titre trompeur car son héros voyageur, Paul-Emile dit «Victor», prof battant la campagne comme le sous-préfet s’en va aux champs, circule peu en habit de nuit finalement –, c’est le personnage de grand-mère fantasque jouée par Anny Duperey qui débite ce viatique entre deux répétitions de ses funérailles (idée morbido-érotique qui court chez Pascal Thomas, de l’épisode du thanatopracteur dans Celles qu’on n’a pas eues à la veillée funèbre d’A cause des filles…). Confondre la libre pensée serpentine hors du temps et le relativisme moral le plus opportuniste, c’est l’écueil du cinéma «vieille France» de Thomas, dont il a tant de fois triomphé pour insuffler à ses plus beaux films une folie et une vivacité véridiques. Pas cette fois.
Le Voyage en pyjama, dans la lignée des livres de «voyages»