C’est bien quelque chose de physique qui prend dans les Poings desserrés, une double sensation permanente : un élan vers le lâcher prise au milieu de l’étouffement. Si le film ne quitte pas Ada (Milana Aguzarova) – son personnage d’adolescente à l’étroit dans sa famille de garçons et dans son village perdu d’Ossétie du Nord, dans le Caucase –, s’il la suit à la trace, la traque, ce n’est pas pour l’emprisonner, comme le font tous les corps qui l’entourent, qui la cernent et qui la poursuivent. Au contraire, le film s’interpose, la caméra veille au grain, entre dans la mêlée quand il faut, lui souhaite la liberté qu’elle peine à conquérir, intervient quand ça tourne mal. Car tout le monde, le garçon qui lui tourne autour, son père, ses frères (celui qui est resté et celui qui, parti à la ville, revient au début du film) ne font que l’attraper, l’étreindre, l’alpaguer et la retenir. A son corps qui voudrait quitter l’enfance – qui ne peut littéralement pas pour des raisons à découvrir et auquel son père refuse les soins qui pourraient le soulager – on ne laisse aucun répit, aucune marge de mouvement.
Ballet furieux
Ada est saisie de toutes parts et le film qui décrit l’espace où elle essaie de naviguer redouble sans cesse d’efforts pour nous faire sentir l’appel d’air en même temps qu’il peint la clôture. C’est là sa pesanteur et sa grâce, quelque chose d’un cinéma russe dont Kira Kovalenko, 31 ans – c’est son deuxième long métrage – hérite mais cherche les lignes de fuite. Elève d’