A 82 et 75 ans, les deux cofondateurs encore vivants du Studio Ghibli, le génial Hayao Miyazaki et son producteur attitré Toshio Suzuki, ne se voient évidemment pas encore tenir des décennies à la tête de leur boîte d’animation, pionnière dans l’industrie du cinéma japonais par son indépendance. Mais à qui donner la boutique en gestion ? La décision a été officialisée ce jeudi 21 septembre : le studio Ghibli, créé en 1985 par les deux compères et feu Isao Takahata, va passer sous la coupe du groupe de télévision Nippon Televsion Holdings.
C’est l’aboutissement d’une «difficile réflexion» entamée depuis longtemps par ces deux patriarches pour assurer leur succession, explique Ghibli. Le «successeur et candidat naturel» était le fils d’Hayao, Goro, lui-même réalisateur et déjà impliqué dans la direction. Mais l’intéressé a décliné, estimant «difficile pour une seule personne de prendre la suite». Il a «jugé préférable que la société soit confiée à quelqu’un d’autre pour assurer son avenir». Goro, qui peine à sortir de l’ombre de son père, a déjà fort à faire avec le parc Ghibli ouvert l’an passé à Nagoya. Ce alors que son père était encore tout occupé entre 2017 et cette année à fabriquer son plus récent long métrage intitulé en japonais «Et vous, comment vivrez-vous ?» qui sortira en France en novembre, sous le titre le Garçon et le Héron.
Stratégie des contenu
Plusieurs options de succession ont été étudiées par Miyazaki et Suzuki mais le choix Nippon TV s’est imposé. Ce groupe va détenir à l’issue de la transaction prévue le 6 octobre quelque 470 actions correspondant à 42,3 % des droits de vote au sein du conseil d’administration. Ce sera ainsi le «premier actionnaire» de Ghibli. Rien n’a été communiqué sur les détails des autres détenteurs de titres ni sur le prix payé par Nippon TV.
Reste que Miyazaki et Suzuki cèdent les commandes effectives de la boîte en ne conservant respectivement que les titres de président honoraire et président du conseil d’administration. C’est un dirigeant de Nippon TV, Hiroyuki Fukuda, celui qui pilote la stratégie des contenus du groupe audiovisuel, qui deviendra directeur général de Ghibli. Trois autres responsables de Nippon TV et un avocat apparaissent dans le nouvel organigramme de la direction, au côté de Goro Miyazaki dont les fonctions précises n’ont pas été communiquées aux médias.
Nouvel espace au parc Ghibli
Le studio Ghibli et ses longs métrages d’animation ont été accompagnés presque depuis le début par Nippon TV (diffuseur des films Ghibli), cofondateur du musée de Mitaka, etc. Le studio se dit «certain que sa façon de fabriquer ses films et les valeurs qu’il porte seront bien défendues par Nippon TV» et que le développement international sera encore mieux soutenu.
Toutefois, selon Ghibli, pas question de céder son indépendance en matière de création. «Le studio garde la main sur la conduite de la réalisation des films d’animation, la gestion du musée Ghibli de Mitaka (Tokyo) et du parc Ghibli» où un nouvel espace, le quatrième, ouvrira début novembre. Et même si Hayao Miyazaki a cessé de conduire sa 2CV Citroën l’an passé et restitué son permis à l’administration, il n’a en revanche pas rendu les clefs du studio ni jeté son tablier. Junishi Nishioka, vice-président de Ghibli, annonçait ainsi récemment au Toronto International Film Festival qu’il ne considérait plus le Garçon et le Héron comme son dernier film.