Menu
Libération
Rétrospective

Mario Monicelli, commedia dévastée

Article réservé aux abonnés
De la Première Guerre mondiale aux années de plomb, le cinéaste italien à l’humour grave et grinçant, exposé à la Cinémathèque, donnait à voir les mutations de son pays dans des satires noires.
Renato Salvatori et Claudia Cardinale dans «le Pigeon» de Mario Monicelli (1958). (Lux-Vides/Collection Prod DB / DR)
publié le 30 avril 2023 à 16h00

Saisir l’époque en une image fulgurante faisant office de paradigme, tel est le génie des grandes comédies à l’italienne, captant d’un trait mordant, irrésistible, l’Italie du boom économique et du capitalisme naissant, ses rêves frelatés et ses laissés-pour-compte. C’est, chez Dino Risi, la Lancia décapotable du Fanfaron, qui finira sa course dans le ravin, ou encore le pauvre diable d’Une vie difficile, crachant son amertume sur les bagnoles des touristes qui passent. Mais qu’en est-il du cinéma de Mario Monicelli ? L’autre maestro du genre dont le film le Pigeon (1958) signait sinon l’acte de naissance, disons la formule la plus pure (parce qu’impure) : un cocktail savamment dosé de farce et de drame, de finesse sociologique et d’outrance grotesque, d’ironie et de pathétique. S’il fallait n’en retenir qu’un, l’instantané monicellien qui fait mouche serait sans doute celui-là, ce cambriolage raté dans les grandes largeurs, cette bande de bras cassés échoués dans une cuisine, pour avoir percé le mauvais mur, et qui, à défaut d’empocher le butin, se retrouvent, une chignole à la main, à manger des nouilles aux pois chiches à 5 heures du matin. Avec en passant une peinture douce-amère de cette Rome périurbaine et miséreuse, son petit peuple de va-nu-pieds et de crève-la-dalle, ses chantiers et ses immeubles en construction qui poussent à tous les coins de rue… L’héritage du néoréalisme marié à la commedia dell’arte.

Petite et grande histoire

Ce schéma narratif – des minables engagé