Bourru, le dédain poli, l’humour archi sec, ou juste anglais, Mike Leigh porte ses 82 ans voûté dans une des salles de la Cinémathèque française, où la rétrospective en son honneur s’est ouverte avec Deux Sœurs, son 21e long métrage. A grands traits, il boit un verre de lait pour contrer un vertige. Rien ne flageole à part ça, et surtout pas l’envie de parler de ce drame de famille, cruel jusqu’à l’épure, autour des souffrances de Pansy, femme en colère. Retour à la banlieue nord de Londres d’aujourd’hui, après deux films en costumes et plus de cinquante ans de cinéma à hauteur d’humains.
De quoi étaient faites les quatorze semaines de répétition qui ont abouti à ce film, sans scénario préalable ?
Je serais simplement incapable de m’asseoir seul dans une pièce pour écrire cette histoire, partir à la recherche d’acteurs et leur tendre le script. L’enjeu est de trouver le film ensemble avec les comédiennes, le directeur de la photographie, les costumiers, décorateurs… Prenez les foyers des deux sœurs, ils sont tellement différents. La maison de Pansy est stérile, celle de Chantelle respire la joie de vivre. Il fallait créer le monde des personnages, construire leur tempérament, leurs relations. J’avais écrit un scénario potentiel de deux ou trois pages, mais le déroulé de l’action et des dialogues, on ne l’obtient qu’en répétant au fil des improvisations. C’est la méthode qui me paraît la plus naturelle depuis mes 22 ans. J’étais issu d’une formation d’acteur on ne