On avait fini par le croire immortel. Il nous avait pourtant prévenus : «Un héros doit toujours savoir mourir.» Et lui, à l’évidence, il savait. A 14 ans, déjà, petite gouape élégante dans un court métrage amateur, le Rapt (1949), réalisé par le père d’un copain avec une caméra Super 8, il s’effondrait, fauché par une balle, la main sur le cœur. Raflé, supplicié et martyr. D’instinct, il connaissait les gestes. Etait-il déjà mort ? En tout cas, il en avait le don. Visage juvénile et offert d’une pâleur si gracile que les bords vaporeux du cadre, tout frémissants de blancheur, semblaient s’en émouvoir. Le film ne dure que quelques secondes, juste le temps de le voir mourir. A peine apparu déjà disparu. Un éclair aimanté par les ombres mais promis à la lumière. Tout Delon y fulgurait déjà : les ténèbres et la grâce, la science innée du mouvement et une présence si dévorante qu’elle en éclipse tout le reste.
Jusqu’à l’annonce de sa mort, à 88 ans, ce dimanche 18 août par ses trois enfants auprès de l’AFP. «Alain-Fabien, Anouchka, Anthony, ainsi que [son chien] Loubo, ont l’immense chagrin d’annoncer le départ de leur père. Il s’est éteint sereinement dans sa maison de Douchy, entouré de ses trois enfants et des siens. […] Sa famille vous prie de bien vouloir respecter son intimité, dans ce moment de deuil extrêmement douloureux», déclare leur communiqué.
Son portrait dans Libération en 1997
Ce tout premier échange avec la caméra, dont il