Le sombre destin de Björn Andrésen ne parvenant jamais à se défaire du rôle qui le révèle à l’international, victime d’une sexualisation qu’il n’a ni anticipée ni désirée, c’est évidemment un thème qui depuis la vague #MeToo et la centralité nouvelle du consentement (aux actes, à l’image) oblige directeurs de casting, réalisateurs et producteurs à aborder avec plus de prudence qu’ils ne le faisaient autrefois la présence des enfants, adolescents et jeunes gens à l’écran. Les cas de carrière précocement brisées ne manquent pas souvent comme on peut le voir par le cruel manque de discernements des adultes de l’entourage, qu’il s’agissent des familles ou des professionnels les ayant propulsés sans préparation dans une notoriété affolante ou humiliante.
Maria Schneider : La comédienne a 19 ans quand elle est castée face à Marlon Brando dans le Dernier Tango à Paris de Bernardo Bertolucci. Une scène de viol par sodomie, la star ombrageuse et le cinéaste italien ayant conspiré à sa simulation sans prévenir l’actrice, choquera et marquera à jamais la jeune carrière de Maria Schneider. Humiliée et objectivée, se faisant insulter ou poursuivre dans la rue, elle tombe dans la dope. Elle continuera de tourner (Antonioni, Comencini, Rivette) mais sans jamais s’affranchir du stigmate précoce d’un scandale qui n’a évidemment nui qu’à elle seule. Elle meurt d’un cancer à 58 ans.
Tatum O’Neal : Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle en 1974 à l’âge de 10 ans pour sa prestation dans la Barbe à papa de Peter Bogdanovich où elle partage l’affiche avec son père Ryan O’Neal, qui était furieux qu’elle ait ce prix. Elle est un cas exemplaire de vie dévastée à peine entamée entre parents maltraitants, soit absents soit défoncés. Ado, elle fait une dépression, tente de se suicider, passe par l’HP, devient la fiancée de Michael Jackson avant de se marier avec le tennisman John McEnroe et de retomber dans la dope (héroïne, crack…), de perdre la garde de ses enfants. En 2018, elle a raconté avoir été agressée sexuellement par des proches de ses parents. La Barbe à papa reste son (seul) chef-d’œuvre. Elle a aujourd’hui 61 ans.
Brad Renfro : Le réalisateur Joel Schumacher cherchait un gamin qui avait grandi trop vite. Brad Renfro, enfant de la classe ouvrière à Knoxville dans le Tennessee, élevé dans une caravane par sa grand-mère, sera donc casté à 10 ans pour donner la réplique à Tommy Lee Jones dans le Client. Ensuite il joue un ado fasciné par le nazisme (Un élève doué de Bryan Singer) ; dans Sleepers de Barry Levinson, il joue un ado interné dans une maison de correction et violé par ses gardiens, puis dans l’archi-dark Bully de Larry Clark (qui le sexualise à fond en bad guy), il est un dur à cuire, souffre-douleur de son meilleur ami. Dès 16 ans, l’ado est dépendant à l’alcool et à l’héroïne. Il se fait serrer à plusieurs reprises par la police. Il meurt d’une overdose à 25 ans.
Linda Blair : Fillette possédée de l’Exorciste de William Friedkin, se masturbant violemment à l’écran avec un crucifix, elle se fait très mal aux lombaires dans une séquence où elle est secouée dans tous les sens : «A 13 ans, j’étais seule avec des hommes de 40 ans qui me disaient de crier plus fort.» Le succès du film déchaîne la folie de certains spectateurs qui la menacent de mort. Elle vit six mois sous assistance policière. Elle tombe en dépression, se drogue. Elle est prise dans une descente de police dans un appartement de dealers. C’est le début de la dégringolade professionnelle. Elle enchaîne les bides, les suites et parodies de l’Exorciste et films de bastons. Finalement, elle retrouve joie de vivre en renonçant aux plateaux de tournage et en s’occupant des animaux abandonnés.