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Libération
Disparition

Mort de l’artiste Jamie Reid, auteur de l’identité visuelle des Sex Pistols

L’illustrateur et auteur londonien, figure de la contre-culture britannique, avait finalement vu ses œuvres exposées dans les plus prestigieux musées d’art. Il est mort mardi à 76 ans.
Les Sex Pistols à bord du «Queen Elizabeth» sur la Tamise, (de gauche à droite) Johnny Rotten (John Lydon), le cinéaste Julien Temple (dos à la caméra), l'artiste et designer Jamie Reid, le cinéaste Doug Smith et le caméraman John Metcalfe, le 7 juin 1977. (Brian Cooke/Redferns)
publié le 10 août 2023 à 16h48

C’est sans doute avec celle du Orgasm Addict des Buzzcocks la pochette la plus emblématique de la première vague punk anglaise : le portrait de la reine Elizabeth II barré par des lettres découpées dans des titres de presse sur la pochette du God Save the Queen des Sex Pistols. Image terriblement provocatrice à l’époque, qui posera les bases de tout un pan de l’esthétique punk basée sur le découpage et les lettrages façon «lettre anonyme», que l’on doit à Jamie Reid. Un artiste né en 1947 à Londres et découvert au tout début des années 70 dans les pages du magazine Suburban Press où explosait déjà son style tout en découpages, déchirures et détournements, directement inspirés par les mouvements radicaux et la contre-culture des années 60. Il illustrera d’ailleurs en 1974 une anthologie d’écrits situationnistes, Leaving 20th Century, avant de démarrer sa collaboration avec les Sex Pistols, pour qui il réalisera l’essentiel des visuels – notamment celui de leur album Nevermind the Bollocks, avec ce tube de glu rose fuschia écrasé sur un fond jaune criard.

Un groupe dont il ne s’éloignera jamais vraiment, ne travaillant que très épisodiquement avec d’autres artistes par la suite (Boy George, Transvision Vamp, Afro Celt Sound System), Reid s’intéressant avant tout à «la dissidence politique et au gnosticisme», qu’il citait fréquemment comme les deux composantes de son œuvre. Exposé au Tate Museum à Londres ou au Moma à New York, il était aussi et surtout une figure omniprésente dans les grands mouvements contestataires, des manifestations contre les lois votées par le gouvernement Thatcher à la fin des années 80 (la Poll Tax, la Clause 28), à Occupy Wall Street ou aux rassemblements de soutien au groupe russe Pussy Riot, dont trois membres avaient été condamnées pour «vandalisme motivé par la haine religieuse», au début des années 2010. Il n’hésitera pas non plus à pointer du doigt certains de ses plus illustres confrères, comme Damien Hirst dont il a publiquement dénoncé à plusieurs reprises «l’hypocrisie, l’avidité et les méthodes agressives». Jamie Reid est mort le 8 août chez lui à Liverpool, à l’âge de 76 ans.