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Critique

«O Corno, une histoire de femmes», naître à penser

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Dans la Galice franquiste des années 70, l’accoucheuse, avorteuse puis fugitive au cœur d’«Une histoire de femmes» devient l’allégorie du film réalisé par Jaione Camborda.
María (Janet Novás), sage-femme, devient la vigie et l’allégorie du film. (Amador Lorenzo/Jaione Camborda)
publié le 26 mars 2024 à 18h21

Tu accoucheras dans la douleur. Accoudée à un prie-dieu dans le clair-obscur d’une chambre de village de la Galice franquiste (1971), cherchant sa position debout, assise, accroupie, une femme accouche ainsi – dans la douleur qui crispe son visage d’implorations pour sa délivrance. La première longue scène de O Corno, une histoire de femmes cristallise le moment mimétique de création et de procréation, le travail de mise au monde de la mère enregistré in extenso par le travail de mise en scène de Jaione Camborda, la réalisatrice.

Naissance : un enfant et un film. Donc un cinéma maïeutique, accoucheur de consciences ici strictement féminines : un unisson parcourt secrètement O Corno, prenant la forme d’une course lente de relais entre femmes solidaires et successives. Suivant au fil de son récit fugueur le cycle naturel de la vie, de la nature, et l’aspiration sauvage des femmes aux plaisirs, les destins se trouvent violemment en butte aux lois iniques des hommes et des dictatures, à l’interdiction de l’IVG, ainsi. D’abord échappée libre et éparse, le film devient le récit forcé d’une fugitive.

La vigie et l’allégorie du film

Après un premier temps qui ne se fixe pas sur un personnage en particulier, entre jeune fille folâtre et amante de magicien coupeur de femmes en deux, ce n’est pas le récit de la mère mais de la s