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Libération
Critique

«Oui» de Nadav Lapid : un film qui hurle de toutes ses farces

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En narrant la crise morale d’un artiste bouffon à Tel-Aviv qui écume les fêtes de l’oligarchie militaire, le long métrage de Nadav Lapid mène une charge acerbe contre la guerre d’Israël à Gaza.

Y. (Ariel Bronz), le héros de Oui, est un artiste aux abois. (Les films du Bal)
Publié le 16/09/2025 à 17h10

Y., le héros, dit «oui», mais Y. va mal – Y. dit «oui» parce qu’Y. va mal. Car Y. dit «oui» à tout ce qui s’offre à lui de pire dans la Tel-Aviv post-7 Octobre, quand son seul salut serait de dire «non». Feue sa mère qui était une femme de gauche, comme nous l’indique une voix off salutaire de perspicacité (elle pourrait être celle du cinéaste), aurait honte de lui si elle était encore vivante. Mais de l’engagement, Y. en est incapable, par lâcheté, résignation, désintérêt et parce qu’il est un homme sans morale – ça aussi, c’est la voix off qui nous l’explicite. Artiste aux abois économiquement et sentimentalement, il joue les clowns, les paillassons, les orifices aux services des riches et des puissants de son pays, et plus spécifiquement ceux dont la richesse et la puissance ont grossi par la grâce de la guerre sanguinaire que l’Etat mène contre les Palestiniens.

Avec Jasmine, sa femme artiste et danseuse pas moins en galère que lui – ils ont un petit garçon en bas âge, manière de dire que leur malédiction va se perpétuer –, il court les fêtes du gratin de Tel-Aviv où grouillent les parasites et les profiteurs de la dévastation, membres de l’état-major et autres milliardaires trop heureux d’achever la corruption d’Israël par les forces du fascisme et de l’argent. A eux et tout ce qu’ils lui fourrent au fond du gosier, Y. le bouffon en bottines croco, sunglasses de gros connard sur le nez et canard sur l’épaule trouve tout «bon» dans son pays et lui dit «oui»