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Portrait d’une jeune «Fifi» en feu

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Histoire de deux solitaires qui s’apprivoisent et portrait doux d’une adolescente, le film de Jeanne Aslan et Paul Saintillan trouve sa voix singulière en évitant les scènes et passages attendus.
Céleste Brunnquell et Quentin Dolmaire, très fins. (New Story)
publié le 13 juin 2023 à 17h00

Sophie, dite Fifi, vit dans la banlieue de Nancy, dans un immeuble HLM au milieu d’une famille trop nombreuse pour l’espace imparti. Entourée de trois sœurs dont l’aînée a un bébé, d’un petit frère turbulent, d’une mère et d’un beau-père aimants et dénués de toute prétention d’autorité, Fifi du haut de ses 15 ans s’extrait dès qu’elle peut de la promiscuité sans trêve des scènes familiales répétées, des tours de salle de bains et des désarrois financiers, entrecoupés de repas swinguant sur le Gitan de Daniel Guichard. Alors elle enfourche son vélo et s’envole avec aux oreillettes le Rappel des oiseaux de Jean-Philippe Rameau (dans la version au piano de Marcelle Meyer) vers la ville, pour aller chercher les cigarettes exigées par le copain de sa grande sœur – c’est loin, la liberté sinue sur les lacets de la route. Fifi vole, faute d’argent, le paquet de clopes, elle a comme ça une série de petites combines. Ou elle aide une dame âgée en allant lui faire ses courses contre menue monnaie.

Tumulte intime où les sentiments s’empêchent

Ce jour-là, elle tombe sur Jade, ancienne copine d’école qui appartient à la bourgeoisie résidentielle (on la croirait, son élocution et ses mines, sortie d’un Rohmer années 80). C’est le début de l’été, c’est le désœuvrement de l’été. Il y a ceux qui partent en vacances à la mer, comme Jade, et ceux comme Fifi qui n’ont jamais vu l’océan. Un concours de circonstances soumises à sa tentation l’amène à piquer les clés de la maison chez la fille de famille. Fifi s’y voit :