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Libération
Road-movie

«Songe» de Rashid Masharawi : de Gaza à Bethléem, l’espoir fait libre

Gaza, l'engrenagedossier
Tiraillé entre territoire occupé et rêves d’avenir, le conte du cinéaste gazaoui suit la quête d’un jeune Palestinien pour retrouver son pigeon voyageur disparu.
Comment tourner un road-movie sur une terre de check-points ? (DR)
publié le 2 avril 2025 à 6h31

Lorsque son pigeon voyageur ne rentre pas à la maison, on explique au jeune Sami, 12 ans (Adel Abu Ayyash), que cet oiseau, quand il se perd, retourne au lieu de sa naissance. Alors commence le périple de Sami pour le retrouver, du camp de réfugiés de Kalandia, en Cisjordanie occupée, où il vit avec sa mère à Bethléem où son oncle Kamal (joué par le célèbre Ashraf Barhom), qui lui a offert le pigeon, vit en taillant dans le bois d’olivier des objets religieux chrétiens. L’origine de l’oiseau s’avérant plus lointaine, Kamal emmène son neveu et sa fille Maryam (Emilia Massou) à Jérusalem puis jusqu’à Haïfa, au bord de la mer, sur les traces du volatile évaporé.

Comment tourner un road-movie sur une terre de check-points, parcourue d’obstacles à la circulation des Palestiniens ? Comment écrire un conte dans des endroits où la possibilité même du récit est minée, chargée de conflits entre les versions de l’histoire ? Simplifier – dans le bon sens du terme –, c’est le geste de Rashid Masharawi, cinéaste né en 1962 à Gaza dans une famille de réfugiés et installé à Ramallah où il fait tout pour rendre possible l’existence d’un cinéma local. Il n’en est pas à son coup d’essai, son Couvre-feu, tourné à Gaza, ayant été par exemple en 1994 le premier film montré à Cannes sous pavillon palestinien. Simplifier, rendre limpide, pour tracer dans le territoire une route qui puisse suivre celles, contraires aux murs terrestres, des pigeons voyageurs et des rêves d’avenir. Filmant à la fois la situation impossible faite à ses personnages et l’espoir d’une géographie libérée, filmant les deux comme des réalités visibles, superposées dans le paysage, Rashid Masharawi cisèle de lieu en lieu, à hauteur humaine et aérienne, sa fable de l’enfant et du pigeon.

Songe de Rashid Masharawi avec Adel Abu Ayyash, Ashraf Barhom… 1 h 19.