Menu
Libération
Interview

Todd Haynes : «“May December” entend faire bouger le sol sous vos pieds pendant que vous le regardez»

Article réservé aux abonnés
Le cinéaste américain revient sur l’incapacité de la famille de Joe et Gracie à se regarder elle-même et sur le lien entre la bande originale et la mise en scène.
L’Américain Todd Haynes sur le tournage de son dixième long métrage. (Francois Duhamel/Arp Selection)
publié le 23 janvier 2024 à 17h30

A 63 ans, l’Américain Todd Haynes demeure un cinéaste plus imprévisible et malin que jamais. Dans May December, il décortique les dynamiques troublantes d’un trio formé de Julianne Moore et Charles Melton et Natalie Portman : les premiers, un couple formé dans le scandale il y a des années ; la dernière, une actrice venue s’imprégner de leur histoire avant de jouer le rôle principal d’un film qui doit l’adapter. Produit avec un budget dérisoire mais jugé désirable jusque chez Netflix, qui distribue le film aux Etats-Unis, son dixième long métrage est son plus ludique, et maîtrisé.

Quel attrait avez-vous trouvé dans le scénario de Samy Burch, qui se déroule dans l’interstice entre un scandale et son adaptation en film ?

Le coup de génie de Samy est de situer le film vingt ans après, quand le mur que la famille a érigé pour se préserver de la honte et du scandale est devenu impossible à faire tomber. Quand seul un élément extérieur peut entamer une excavation de son passé.

Elément extérieur plus trouble qu’il n’y paraît puisque Elizabeth, la star de télé jouée par Natalie Portman, n’est pas un personnage très fiable.

Elle apparaît dans l’histoire comme celle à laquelle nous sommes supposés nous identifier, mais ce qui se déroule ensuite révèle une chausse-trape. Tout ça était évident dans le scénario de Samy, lesté d’un esprit qui m’a beaucoup troublé, et amusé. Le défi qui se posait était de reproduire ce trouble et de le rendre tout aussi plaisant au spectat