Le moins que l’on puisse dire, c’est que Blanche Gardin construit une filmographie cohérente sur le burn-out du monde technologisé, après Selfie, film à sketchs sur les affres de la dépendance numérique, ou encore Effacer l’historique, où trois gilets jaunes déclaraient la guerre à l’ultra-connexion. Quitte à se retrouver exactement là où on l’attend dans Un monde merveilleux, elle est cette fois une mère antisystème, qui dit merde aux nouveaux usages d’une société entièrement assistée par des robots. Une crise d’attractivité de la fonction publique semble avoir motivé l’emploi des androïdes dans les hôpitaux, commissariats et écoles, en plus de leur utilisation dans les foyers où plus personne ne s’en passe au quotidien.
La réussite du premier long métrage de Giulio Callegari loge dans sa simplicité artisanale pour évoquer un monde au futur proche, sans effets spéciaux ni sensation d’irréalité liftée. T-O, l’androïde au cœur simple qui accompagne Max dans une cavale à travers la France pour récupérer la garde de sa fille, existe physiquement comme personnage (les robots sont interprétés par des actrices en costume), à peine plus futuriste qu’un gros micro-ondes qui parle. Ça a beau pencher vers une morale un peu Disney, une humeur désabusée emporte cette formule de buddy movie, où l’angoisse moderne s’accorde à l’hyper familiarité moche d’une vie de supérettes et d’aires d’autoroute. Univers mi-blasé mi-sénile, criblé de bugs, où flotte la nausée d’une humanité au bout du rouleau, et l’absurde fait l’effet d’un long soupir.