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Libération
Inceste

«Une famille» de Christine Angot, un documentaire pour affronter le déni droit dans les yeux

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L’écrivaine nous entraîne, à travers un docu poignant tourné en partie à Strasbourg et s’appuyant sur des archives personnelles, dans l’examen tenace de ce qui a rendu l’inceste possible.
Christine Angot et sa fille, Léonore, dans «Une famille». (Nour Films)
publié le 19 mars 2024 à 16h45

Les premières images sont celles d’un film de famille. Des parents suivent d’une fenêtre, en plongée, le trajet de leur fille qui revient de la boulangerie. C’est sans doute la première fois qu’elle va chercher le pain toute seule, ce qui est toujours, dans toutes les familles (cette sortie à la boulangerie et pas ailleurs, sait-on pourquoi) un moment fondateur. On se demande : est-ce Christine Angot cette petite fille ? Est-ce son père, dont elle a subi les viols, qui tient la caméra ? Non bien sûr, le caméscope indique une date, 1995, c’est donc la fille d’Angot qu’on voit en bas, dans la rue, celle à qui la romancière dédie ses livres, celle à qui elle dédie ainsi Une famille.

Il y aura dans ce premier film de cinéma réalisé par Angot (1) de nombreuses images tirées de ses archives personnelles : photos de sa jeunesse, VHS… Le reste du temps, il s’agira d’un corps à corps. Nous, très près d’elle, épaule contre épaule avec Caroline Champetier et Inès Tabarin qui tiennent les caméras, nous tous comme une équipée partie pour un Voyage vers l’Est, à nouveau. Tourné en sept jours, le film commence justement quand sort son livre, qui revient sur l’inceste et ce qui l’a rendu possible (prix Médicis en 2021, dont Stanislas Nordey fait une