«Ici, on fait toute sa vie sous la même toiture, on naît dans le lit de gauche, on meurt dans celui de droite et entre-temps, on s’occupe des bêtes à l’étable.» Ici, c’est une ferme, perdue au milieu de nulle part, loin de la ville et des tentations, où s’entassent les générations et les animaux. Une gamine, de ses yeux d’enfant, observe le monde qui l’entoure, immuable en apparence, hors temps et cadre, mais dont les jointures finissent par craqueler, rattrapé par la mort et la modernité. L’enfant, elle, est différente des autres gens de la famille, elle a le palais délicat, les jointures fines, elle ne mange rien et se fait volontiers poète en regardant les vaches. «La gamine, quand elle regarde son pelage, elle voit plutôt des continents. […] Faire le tour de cette vache, c’est partir en voyage. Il y a, vers ses hanches, des petites îles, un archipel de taches de rousseur. […] Personne ne voit que c’est beau, que cette vache, ce n’est pas un vieux torchon sale mais un tableau, une percée sur le monde, une promesse d’évasion.»
Marion Fayolle, 35 ans, est connue depuis près de dix ans pour ses talents d’autrice de bandes dessinées. Illustratrice pour le New York Times, la Française a publié plusieurs ouvrages salués par la critique pour la finesse et la profondeur des émotions qu’elle transmet. Du même bois