Visage tourné vers le ciel, corps en lévitation et membres prolongés par des racines, une silhouette translucide s’élève sous la voûte noire du Fresnoy, à Tourcoing (Nord). C’est l’exuvie de SMITH, l’enveloppe corporelle de l’artiste trans, qui se débarrasse de sa dépouille comme un insecte. Cette saisissante installation, spectrale et extasiée – intitulée avec humour le Vaisseau pomme de terre ou l’Extase de Monsieur Patate –, est aussi le réceptacle, grâce à un système de projection, des souvenirs moulinés par IA de l’artiste, prof au Fresnoy. Il est beaucoup question de biographie, de mémoire, de psychanalyse, d’intimité, de transmission dans «Panorama 26», l’exposition annuelle qui rassemble élèves et professeurs (dont Justine Emard, Macha Makeïeff et Verena Paravel). Perte d’une petite sœur pour le Thaïlandais Chayarat Ritaram, migration depuis Damas pour le Syrien Amer Albarzawi, origines et culture tatare pour la Russo-Tatare Anna Biriulina sont par exemple les histoires personnelles qui traversent les installations. Au Fresnoy, le récit de soi n’est plus un tabou, il est même encouragé. La commissaire, Marta Gili, a trouvé un bon titre pour l’expo : «Toute ressemblance avec la réalité n’est pas une pure coïncidence.»

Aidés de toutes les technologies multimédias (VR, film, 3D, photographie, jeu vidéo), les artistes œuvrent au cœur du paradoxe numérique, à l’endroit même où la dématérialisation menace les souvenirs et revêt le pouvoir magique de les