Qui est vraiment le «nous» de ce titre ? Les «familles comme la nôtre» – donc une famille pas comme les autres, tordue, dysfonctionnelle – sont-elles celles du sang, puisqu’il y a bien au cœur de cette série chorale une famille recomposée, ou la famille malade relèverait-elle d’une idée plus ample et métaphorique, à savoir la nation ?
Thomas Vinterberg, 55 ans, une dizaine de films, dont un fort célèbre qui aurait pu porter le même titre (Festen), n’a peut-être jamais autant parlé de son pays que dans cette série d’anticipation qui imagine un Danemark évacué de ses habitants à la suite du risque de la montée des eaux. Face à des dépenses exponentielles condamnées à long terme (dans la réalité, le pays aligne en effet régulièrement les milliards pour renforcer ses digues), le gouvernement préfère se saborder et disperser ses citoyens dans une Europe où cette énième crise migratoire semble refermer pour de bon la parenthèse de la libre circulation.
Il y a d’abord la suggestion évidente, et franchement obscène, visant à vouloir donner à un public occidental une image de la condition de réfugié dans laquelle il serait plus à même de se projeter. Au-delà, la série n’est pas dénuée d’un certain intérêt en ce qu’elle enregistre et travaille plus ou moins volontairement une crise culturelle. La question du sentiment national, et du vide symbolique a priori vertigineux que laisse un pays physiquement annulé, est pratiquement évacuée par un récit peuplé de danois assez indifféren