Longtemps le langage courant a qualifié le meurtre d’une femme assassinée par un mari, un amant ou un ex-compagnon de «crime passionnel». L’expression impropre a disparu des usages, souvent remplacée par celle de «drame conjugal» tout aussi floue : le «drame» relève d’une terminologie théâtrale ; c’est encore une façon de métaphoriser un acte barbare et sordide qui n’a rien de romantique. Mais que dire du «féminicide» dont des collectifs militent pour l’entrée dans le Code pénal ?
Prison mentale
Le terme fait polémique. Trop restrictif selon certains, car ne pointant que le caractère misogyne de ces crimes, il ne tiendrait pas assez compte de la variété des contextes, la singularité des cas. La réalité des violences faites aux femmes et des situations où elles ont trouvé la mort dans un cadre intime est-elle si complexe et diverse qu’elle peine à trouver le mot juste pour la dire ? Quoi qu’il en soit, si la reconnaissance juridique du féminicide est sujet à controverses, le terme a le mérite de mettre en exergue une réalité accablante : en France, environ 150 femmes trouvent chaque année la mort dans un cadre domestique. Mais derrière ces chiffres pèse comme un secret insondable. Des victimes, on ne sait la plupart du temps presque rien, comme si au sein même de leur foyer, elles étaient murées dans le silence comme en une prison mentale d’où rien ne filtre. Difficile de briser cette chape de plomb, constate Aurélie Braud dans son enquête édifiante autour de troi