Les derniers feux du couchant nimbent l’Odéon d’Hérode Atticus, dont les interstices abritent de nouveaux bustes et statues chinois. L’orchestre installé en fosse, une jeune vestale s’avance sur le plateau avant d’être sauvagement abusée par des inconnus. Ce prologue inhabituel donne la clé dramaturgique de l’ultime chef-d’œuvre de Puccini : c’est parce qu’elle s’identifie à son aïeule, Lo-ou-Ling, victime d’un viol, comme elle le chante au deuxième acte («Toi qui as défié, inflexible et sûre, l’âpre domination, aujourd’hui, tu revis en moi !») que la princesse Turandot refuse l’amour des hommes qu’elle fait décapiter à tour de bras.
D’aucuns se seraient engouffrés dans cette brèche pour livrer une lecture mise à jour sur les violences sexuelles et leurs tragiques conséquences ; pas le sage Andrei Serban dont la première Turandot est régulièrement reprise au Covent Garden de Londres, depuis plus de quarante ans ! C’est Chloé Obolensky, décoratrice et costumière historique de Peter Brook, dont le metteur en scène roumain fut l’assistant, qui a suggéré à l’opéra d’Athènes de l’engager. En ajoutant à ce duo le chef lumières Jean Kalman qui a également collaboré avec Obolensky sur le sublime Death in Venice, de Britten, que signa Deborah Warner, on tient la recette d’un spectacle élégant et sensible.
Sérieux et passion
La magnificence des habits