Ils sont tous restés ou presque, pendant les treize heures du spectacle, les vaillants spectateurs du Nid de cendres de Simon Falguières, méticuleusement comptés à chaque retour d’entractes et de pauses (six en tout, lors desquelles certains esquissaient des étirements de gymnastique), par la meneuse de revue Sarah à l’index dressé (Camille Constantin Da Silva), qui avec malice s’extasiait à chaque fois : «Ils ne sont pas partis !» (rires dans la salle). «On est là !» abondèrent au mitan les spectateurs.
Et lorsque vint la fin, ils se levèrent d’un bond pour applaudir la troupe, ces comédiens si pleins de jeunesse et d’énergie, qui ont porté cette épopée théâtrale avec une fougue peu commune, et dont certains semblaient au bord des larmes, lors du dernier salut, ébahis, un peu sonnés, de ce qu’ils avaient traversé, de cette journée et cette nuit d’illusion et de dépense – et nous avec. Un singulier petit phalanstère de théâtre s’était créé là, sur la scène et les gradins en velours rouge de la Fabrica, îlot résolument en marge du monde et de ses contraintes, aventure de théâtre comme il ne s’en fait plus guère (citons Julien Gosselin, déjà en ces lieux, il y a quelques années). Ce qui, logiquement, était le sujet même du spectacle (l’âge d’or, comment y revenir), et dont tout ce qui le menace se trouve à ses racines mêmes : sa coupure d’avec le monde, son culte du passé. La renaissance du théâtre, du grand théâtre populaire, ne peut-elle advenir qu’en fét